De Orenda
Bonjour,
cela fait des mois que je ne me suis pas connectée. Je me suis dit que j’allais laisser un petit mot pour faire un bilan rapide de mon expérience. Je suis débordée de travail donc je vais à l’essentiel.
J’ai commencé un diplôme de traduction professionnelle à Concordia en septembre 2014. J’ai été très bien accueillie et je n’ai pas regretté mon choix même si j’ai été assez déroutée par le fonctionnement de l’université ici, qui fait que ça devient vite compliqué de finir sa formation dans le temps annoncé. En fait, au moment où je suis arrivée, Concordia inaugurait sa nouvelle maîtrise en traduction professionnelle et j’ai pu faire une demande pour glisser vers ce programme. Je vais donc bientôt obtenir ma troisième maitrise. J’ai un peu l’impression d’être un cancre qui triple sa classe mais bon. J’avais aussi été prise à l’UdeM, mais, ayant déjà étudié en prépa (à Henri IV svp), à la Sorbonne et à Warwick, j’en avais ma claque des établissements prestigieux mais pète-sec, je voulais profiter de la vie. Finalement, Concordia est très bonne en traduction, victime de son propre succès même, de nombreux étudiants quittent les autres facs pour y venir. Aux derniers Jeux de la traduction, Concordia a littéralement écrasé les autres facs et remporté TOUS les prix. Donc, non seulement j’ai fait le bon choix, mais en plus je me retrouve à faire la seule maîtrise en traduction qui sera reconnue par l’Ordre des Traducteurs (OTTIAQ). Quel coup de bol !
Je n’ai eu aucun mal à m’acclimater et je n’ai pas éternué une seule fois de l’hiver, je n’ai pas non plus eu de problème de dépression saisonnière comme je le craignais, en fait, je suis dans une forme olympique, je suis un peu surprise mais je me porte vraiment bien depuis que je suis ici.
Mon problème principal a été de trouver du travail. Je travaillais comme traductrice pour une boîte qui payait honteusement mal (non, sérieusement, impossible de trouver plus bas, j’ai regardé) et ne respectait pas mon travail. Mais je me suis accrochée car je ne trouvais pas autre chose et en plus je me suis rendu compte que toutes les annonces pour des jobs de traducteur débutant demandent 3 ans d’expérience. Alors j’ai tenu un an et j’ai démissionné. On était alors en avril, « l’été » commençait et j’ai voulu chercher un travail. J’ai envoyé un tas de CV, je n’ai jamais eu de réponse. Pas une seule. Assez inquiète, je suis allée montrer mon CV à une conseillère d’orientation qui n’y a pas trouvé à redire. Je commençais donc à me demander quoi faire s’il était aussi difficile de trouver un poste, mais plutôt que de déprimer, j’ai fait du sport et j’ai travaillé pour moi. J’ai commencé à traduire un recueil de poésie et des articles de psychologie, j’ai lu, j’ai blogué, j’ai trouvé par hasard un groupe sur Facebook pour les jeunes langagiers (LSPC-CLEP) où j’ai trouvé des ressources, du réseautage, et où quelqu’un a posté une annonce pour une traduction de site Internet bénévole. J’ai répondu et eu la mission (car j’avais des compétences dans le domaine en question). Pour me remercier, un des bénévoles m’a demandé de lui transmettre mon CV pour sa boîte qui employait des traducteurs, sans pouvoir me garantir quoi que ce soit. Il se trouve que la boîte (une GROSSE boîte) m’a fait passer un test et m’a prise comme sous-titreuse en mai, mais sans me confier de mission. Sauf le 15 août, où ils ont commencé à me bombarder de projets. Juste avant la rentrée, bien sûr !
En parallèle, j’ai commencé à m’intéresser à un sujet totalement décalé, après avoir eu un travail de terminologie à faire dessus, et totalement par hasard j’ai trouvé qu’une association spécialisée dans le domaine ouvrait tout juste une antenne au Québec. J’ai écrit pour proposer mes services. C’est rendu que je suis présentement leur directrice des communications !!
J’ai aussi trouvé ma première cliente, qui me fait traduire un morceau de sa thèse de sociologie en catastrophe pour une somme modique, je le sens passer et cela me met en difficulté vis à vis de mon travail universitaire, mais c’est la vie.
Cerise sur le gâteau, j’avais prévenu que je voulais faire un stage l’été prochain, mais Concordia m’a demandé si je serais volontaire pour faire un stage cet hiver car ils manquent de candidats. Je viens de réussir le test très sélectif d’une agence vraiment sympa et dynamique, et située à quelques minutes à pied de chez moi. Je me trouve donc en position d’aller demander à Concordia de me laisser faire des tutorats à la place de certains cours (il est interdit de prendre plus d’un cours en plus d’un stage, mais moi je dois prendre trois cours minimum à chaque fois, pour le visa), car bien sûr il est hors de question que j’attende 2017 pour prendre les cours que je vais manquer à cause du stage. Moi, ça m’arrange. Rendue à ma troisième maîtrise, certains cours sont vraiment trop destinés à des jeunes qui débarquent, c’est compréhensible, mais je n’y apprends rien alors que j’ai plein de projets personnels utiles à développer. Donc je vais leur dire : donnant-donnant !
En résumé : après une période d’inquiétude, tout semble en train de se combiner fort joliment pour moi, donc même si je suis assez surmenée, je savoure ce moment de succès car je suis venue ici pour me reconvertir et gagner ma vie pour faire des projets qui me tiennent à c?ur, alors quand j’ai vu que personne ne voulait m’employer j’ai commencé à désespérer de m’intégrer quelque part un jour. Je précise que l’agence qui me prend en stage a pour politique d’être sélective car après les stagiaires sont employés en interne. Donc c’est un progrès majeur que je suis en train de faire en ce moment car il est possible que mon avenir à moyen terme soit réglé !
Je tiens à dire qu’en tant que personne Asperger (ça ne se voit pas forcément que je le suis, mais les gens voient que je suis un peu disons… différente), je me sens vraiment bien accueillie ici. Quand je demande à porter mon casque dans la salle informatique, personne ne me regarde de travers, quand je fais un faux-pas social, les gens sont compréhensifs, etc. Ça me facilite vraiment la vie. J’ai pris beaucoup d’assurance et je peux être moi-même sans qu’on me fasse remarquer toutes les deux minutes que je « fitte » moyennement. Disons que mon seul souci est que j’ai pris un tel coup de jeune ces derniers mois que les gens croient tous que je sors du Cégep alors que je suis trentenaire. Ils s’adressent à moi en conséquence et ça peut être assez ennuyeux en fait. Et quand je suis face à un mauvais prof, c’est assez délicat, ayant été prof moi-même. Parfois, j’ai envie de les virer et de faire cours à leur place, tellement ils manquent de pédagogie et d’idées.
Je suis une personne qui n’a aucune idée de ce qu’est le dépaysement ou le mal du pays. Je me suis sentie chez moi ici immédiatement, et mon ancien pays ne me manque jamais, même si j’y étais bien. Pour moi, la décision de reprendre des études était un gros échec. J’avais déjà eu du mal à trouver un travail et à ne plus être dépendante de mes parents, il était humiliant de me retrouver à nouveau dans cette situation, et j’ai vraiment commencé à paniquer cet été. Je suis à présent rassurée et je peux dire que je suis très heureuse dans ma vie à Montréal.
Bienvenue à tous les nouveaux et bon courage à tous car je sais que ce n’est pas tout le monde qui vit l’immigration aussi positivement.
De Cherrybee
Quel beau bilan! À mon avis, vous méritez bien le bonheur qui vous arrive. Ce n’est pas un hasard. Vous vous êtes bougée, vous en récoltez les bénéfices. Bravo à vous!
De Mapiki3
Belle force de caractère, bravo !
De Michoko2
Félicitations pour ton parcours, et bonne chance pour la suite de ta carrière !
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