Ma cabane au Canada.
La voisine, ma nouvelle meilleure amie, s’est installée chez nous la semaine dernière. À moins que ce soit nous qui habitions chez elle… Elle s’appelle Gwendoline, parce que c’est une fille, j’en suis sûr. Elle a de grands yeux verts avec des longs cils, adore la salade et se pavaner sous le soleil de notre clairière, que nous appelons notre ‘cour’, en contemplant curieusement quelques chevaux qui perturbent ce tableau tranquille et silencieux de montagnes, de rivières et de forêts.
Bien trop pataud pour rivaliser au sprint avec elle, Largo, chasseur de petits rongeurs ou autres « artic ground squirrels » remuants, bondit dès qu’il entend les petits cris stridents qu’elle pousse quand elle aperçoit le bout de sa truffe affairée. Ça l’excite. Puis, avant de replonger dans son terrier, elle lui lance un dernier petit rire malicieux…. alors il revient, penaud et contrarié, se coucher sur le balcon de notre cabin, posée au bout du chemin, à l’ombre du petit bois de bouleaux.
Je contemple le spectacle depuis ma fenêtre chaque matin, alors que je tente de m’extirper des bras de Morphée après m’être extrait péniblement de ceux de ma blonde. Je ris un peu. Puis, je rentre dans un autre rêve, celui que nous nous sommes construit et dans lequel nous vivons aujourd’hui dans notre cabane au Yukon….
J’y pense souvent le soir à ce rêve éveillé, vers 11h, pendant que je me prélasse dans les sources d’eau chaude, au milieu de rochers rouges où l’eau à 40 degrés coule à l’année longue….
Je pense aussi à l’hiver…. surtout le week-end passé, quand nous sommes allés chez Nicolas Vannier pour garder ses chiens de traîneaux. Nicolas, c’est un explorateur et écrivain français un peu zinzin qui parcourt le grand Nord canadien et sibérien depuis une vingtaine d’années, mais pour qui le Yukon reste la place privilégiée. On s’est fait copains avec Voulk, Québec, Tagish et les autres, les héros d’un long métrage qui sortira en salle l’an prochain : « Le dernier trappeur ».
Cela dit, je suis heureux d’avoir passé du temps à Québec et Montréal le mois passé pendant mon court séjour ‘d’affaires’. Même si c’est quand même moins relax qu’ici, qu’il faut se taper 3 vols sur Air Canada pour y aller, qu’il faut arriver à l’heure au boulot sinon on se fait remarquer, ben c’était très chouette de vivre au Québec pendant cette période festivalière. J’ai hâte d’y retourner l’année prochaine…. Mais, je suis pas fâché d’être de retour au Yukon…. avec tous ces gens qui y ont posé le pied un jour, et qui sont complètement tombé en amour de la dynamique et spectaculaire Whitehorse, de la région, son histoire, l’immensité des paysages qui donne le vertige, la culture francophone qui côtoie l’autre harmonieusement, son climat semi-aride et ses températures extrêmes, ce lieu magique d’aventure et de jubilation….
On s’y sent vite chez soi au Yukon. Tout le monde se ressemble, tout le monde arrive d’ailleurs. Même sans l’avouer, les gens d’ici ont fui quelque chose quelque part et se sont installés dans un nouveau pays, paisible, sauvage, à l’écart du reste du continent. Car au Yukon ou en Alaska, le stress est devenu un vieux concept refoulé, les habitants vivent tranquilles au rythme de la fameuse « Yukon time ». Dans une atmosphère de vacances quotidiennes, ils partent en canot sur la rivière ou parcourent en vélo des trails de montagne interminables… Et, dans un paysage comme même Tolkien n’aurait pas inventé, des vieux hippies barbus -peut-être des elfes- vieillissent en paix dans une cabane de bois rond, en même temps que leur chien, savourant la vie qui se rallonge comme les jours en été.
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