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Je ne serai pas Sage-Femme…

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Je ne serai pas Sage-Femme

L’équivalence des diplômes, la reconnaissance des acquis n’ont jamais été pour moi un sujet d’inquiétude puisqu’ayant étudié en commerce international, je ne fais partie d’aucun ordre. De plus, je dois avouer que j’ai eu la chance d’avoir des diplômes francais. Malgré tout ce qui ce disait, sur le forum notamment, je ne croyais pas que j’aurai à faire des études au Québec par necessite professionnelle, mais plutôt par plaisir.

Ceci dit, lorsque que je suis arrivée en septembre 2003, je m’accordai une année pour reflechir aux possibilités professionnelles qui s’offraient à moi à Sherbrooke et à voir éventuellement quelle maîtrise m’interesserait le plus a Sherbrooke car il faut que je m’en souvienne, j’ai choisit Sherbrooke comme destination en grande partie par son université et l’université anglophone Bishop’s…. En attendant, j’avais décidé de « prendre ça cool » comme on dit ici et de m’occuper de ma vie personnel et de mon intégration en gardant une petite job « relax ». C’est ce que j’ai fait et il fallait bien entendu assumer les consequences financières des fins de mois pas toujours faciles mais dans l’ensemble, je ne suis pas mecontente de travailler dans un centre d’appel. C’est tout de même plus confortable qu’a l’usine !

Lors d’un brainstorming informel avec mes collègues au mois de décembre vers 22h30 alors que nous n’avions pas vraiment d’appel, une amie m’a parlé du Baccalaureat en Pratique Sage-Femme de l’Universite de Trois-Rivières, seule université ou cette formation est dispensée au Québec. J’ai tout ce suite eu le coup de cœur pour ce métier qui est au Québec bien différent qu’en Europe ou au Maroc même puisque les sage-femmes accouchent ici toujours naturellement et sans supervision de médecin lors de grossesse non compliquées. Elles ne sont pas des infirmières spécialisée en obstétrique, elles étudient l’obstétrique durant 4 ans. Elles mettent en avant l’humanisation de l’enfantement et impliquent le couple, la famille dans la grossesse et l’accouchement. Bref, tout un tas de raison qui font que j’ai réellement voulu faire ce métier.

En rentrant ce soir-là à minuit, je me suis connectée au site de l’université, j’ai tout lu, tout imprimé, fait plein de recherches et j’étais toute excitée de voir que MOI AUSSI, je pouvais être Sage-Femme. En gros et pour ne pas rentrer dans les détails, tout le monde peut appliquer, à condition de faire les préalables et d’avoir fini le secondaire. J’ai tout de suite téléphoné à l’université pour poser des milliers de questions et j’ai vraiment eu un accueil exceptionnel. La dame m’a parlé pendant plus d’une heure au téléphone et je me suis appercue par la suite qu’en région, par rapport aux grandes villes, le service est de qualité.

Je devais donc faire 3 cours préalables du Cégep et 50 heures de travail communautaire dans un environnement périnatal afin d’être sure que je voulais faire ce métier. Pour cela, j’ai contacté la maison de naissance de Sherbrooke pour leur proposer mes services en tant que bénévole. J’ai été bien chanceuse car j’ai tout de suite été contactée pour participer a l’organisation d’un grand événement avec les mamans et des sage-femmes pour faire pression sur le gouvernement afin d’autoriser les accouchements à domicile. C’était une très belle expérience car j’ai rencontrer beaucoup de femmes usagères de la maison de naissance et militantes pour l’expansion de la condition des sage-femmes et la préservation de l’authenticité de leur metier. Il faut savoir que le Québec est encore l’un des seuls pays occidentaux à être aussi réticent à reconnaître l’intérêt des sages-femmes. Les progrès sont lents mais ils sont là.

Entre-temps, je me suis inscrite à l’université de Sherbrooke pour faire une maitrîse en Administration avec une concentration en commerce électronique car je n’étais pas sûre d’être admise à Trois-Rivières. Je n’ai eu aucun problème pour faire valoir mes diplômes car l’université de Sherbrooke reçoit beaucoup d’étudiants étranger et reconnaît elle-même les diplômes des étudiants. J’y suis admise et j’en suis bien contente. Vous comprendrez en lisant le reste. Le Bac en Pratique Sage-Femme est très contingenté et on y admet qu’un maximum de 24 étudiantes cette année (les hommes sont acceptés mais n’ont pas l’air très interessés par ce métier !). Cependant souvent, on en accepte beaucoup moins car les exigeances sont élevées. J’ai rencontré des étudiantes sage-femmes qui ont dû appliquer plusieurs années de suite avant d’être admises. J’ai eu la chance d’avoir été acceptée aprés examen de mon dossier, test écrit et entretien oral.

Au Cégep de Sherbrooke, ils n’ont pas voulu de moi pour faire les préalables disant qu’il faudrait que je refasse les cours de physique-chimie du secondaire 4, secondaire 5 et Chimie Générale du Cegep. Il était bien évident pour moi qu’il n’était pas question de faire 3 préalables pour un prealable !! J’ai suivi les conseils de l’université et je me suis inscrite au Cégep à distance de Rosement pour faire le cours de Biologie Humaine et à l’Université Laurentienne en Ontario pour le cours de Chimie Organique par correspondance. La chimie organique est un cours plus élevé que la Chimie des Solutions. Pour m’inscrire à ces deux cours-là, il a fallu que je fasse faire l’équivalent de mes diplômes pour le Cegep et je trouve d’ailleurs qu’on ne me reconnaît pas grand chose…. A l’Université Laurentienne, mes diplômes ont suffit. Pourquoi est-ce que les reconnaissances des acquis ne sont pas les memes partout ? Ah, l’un est l’université et l’autre est un Cégep me dira-t-on, ou bien au Québec ce n’est pas comme en Ontario ….

Je ne pouvais pas suivre le cours de Chimie des Solutions à distance car il faut y faire des expériences en laboratoire. On m’a conseillé de faire la Chimie organique d’abord afin d’avoir moins de bâtons dans les roues pour m’incrire en Chimie des Solutions. J’ai certainement dû appeler une bonne dizaine de Cégep à travers la province pour faire ce cours-là en formation continue et j’ai pu m’inscrire au Cégep de Trois-Rivières pour faire ce cours intensif. Yes, gagné ! Et c’était la meilleure chose qui pouvait m’arriver car je devais déménager à Trois-Rivières de toute façon. Mon soulagement n’a pas duré longtemps car j’ai eu un malheureux message sur mon répondeur me disant que le cours avait été annulé….

C’était bien dommage car avant de m’y inscrire, j’avais tenté auparavant une admission pour la session d’automne afin de faire le cours en parallèle de mes six cours d’université même si je n’étais pas très enthousiaste à l’idée d’avoir à tout faire en même temps, mais le service des admissions s’est montré absolument inflexible quant à mes équivalents et mes efforts furent vains à l’époque. J’ai dû recontacter ce service car il représentait ma dernière chance de pouvoir faire ce cours-là avant Noël, comme je l’ai promis à la directrice du programme Sage-Femme de l’université. La dame voulait que, malgré mon cours de Chimie Organique largement entamé, je lui prouve que j’ai étudié les 3 préalables (secondaire 4 et 5 et Chimie Générale du Cégep). Lorsque je lui ai répondu que je faisais déjà la Chimie Organique à l’Université Laurentienne lorsqu’elle m’a dit de faire tous les préalables puisqu’ils ne connaissent pas mon niveau en chimie, elle a dit quelque chose du genre : « Oui, mais l’université Laurentienne est en Ontario …. ». Pis, on est toujours au Canada, non ?? Comment font les étudiants qui changent de province. Le Cégep n’existe qu’au Quebec, comment font-ils s’ils veulent venir étudier à McGill ou à Concordia ? Doivent-ils refaire le Cégep ???

Bref, après avoir discuter longtemps, elle voulait maintenant que je prouve que j’ai fait de la chimie au secondaire. Pour ceux qui connaissent l’enseignement francais, souvenez-vous qu’on commence à en faire en 5ème et ce, jusqu’en seconde dans l’enseignement général. Evidemment, je n’avais jamais imaginé qu’à 26 ans, je devrais rendre compte de ce que j’ai fait à 12 ans. Mon lycée a eu du mal à vouloir m’envoyer mes relevés car ils sont archivés depuis bien lontemps (cela fait neuf ans que j’ai eu mon Bac, mine de rien) et puis personne ne demande jamais ces relevés puisqu’après avoir fini le secondaire, ce qui compte, c’est le diplôme.

J’ai réussi à obtenir mes relevés pour finalement me faire dire de venir à la journée des inscriptions à temps partiel après la mi-août car de toute façon rien de ne pouvait être fait avant puisque le Cégep fermait ce jour-là pour les vacances d’été. De plus, quand bien même on m’admetterait sans faire la Chimie Générale du Cégep, je n’aurai une place que s’il en resterait puisque ne faisant pas partie d’un programme d’étude au Cégep, je n’ai pas de priorité (ce que je comprend tout à fait par ailleurs). Ajoutons à cela qu’il n’y a qu’un seul groupe d’ouvert à l’automne, ce cours étant généralement dispensé en de plus nombreuses classes à l’hiver.

Ce fut la goute qui a fait déborder le vase car voyez-vous, si vous avez eu du mal à me suivre jusqu’ici, dites-vous que je vous ai epargné bien des details ! Il a fallu que je me rende à l’évidence. Malgré les 4 années difficiles et de vache maigre qui m’attendaient (on ne peut pas travailler durant la formation), malgré la situation des sage-femmes toujours en bataille pour leur droits, malgré les salaires pas très rassurant, je voulais être Sage-Femme. J’ai persévéré et fournit énormement d’efforts et fournit beaucoup d’énergie pour faire du bénévolat, le cours de biologie et de chimie organique qui est difficile surtout que cela fait bien 10 ans que je n’en ai pas réflechit à une molecule.

J’ai joué toutes mes cartes. J’ai baissé les bras et admis que même si beaucoup de portes nous sont ouvertes en Amerique du Nord, il faut énormement de force et de courage pour les traverser. En France ou au Maroc même, jamais je n’aurai pu envisager de changer de carrière complètement. Ici, on peut changer d’avis et saisir les opportunites. Mais je dois reconnaître maintenant avec l’experience et ayant des diplômes étrangers, ce n’ai pas facile du tout. A chaque fois ou je me suis adressée à divers organismes scolaires, j’ai eu l’impression qu’ils n’avaient jamais rencontré d’immigrants avec des diplômes d’ailleurs. Je ne suis pourtant pas la première à vouloir retourner à l’école pourtant ! J’ai le sentiment qu’on tient à tout prix a préserver le niveau éducatif du Québec, mais à l’étranger, on étudie tout aussi bien ! Je ne garde pas le souvenir d’un bel accueil de ce côté la malheureusement, toujours à chercher le petit détail qui me fera entendre « Oui, mais ! ».

J’ai donc téléphoné à la directrice du programme Sage-Femme pour lui dire que je ne serai surement pas des leurs en septembre à cause de ce parcours si cahotique depuis le 6 mois mais elle m’a encouragé à continuer à étudier les cours déjà commencé. Je m’applique donc à étudier la chimie presque tous les jours pour avoir de bonnes notes aux devoirs et à l’examen. Je vais passer mon examen de biologie bientôt. Je continue de me battre dans cette voie meme si je sais que je n’aurai pas complété tous les préalables requis au Bac en Pratique Sage-Femme. J’ai mis des œillères et je continue à étudier les hydrocarbures car je n’ai pas fait mon deuil. Tant pis, j’aurai étudié ces matières pour rien mais je ne les aurai pas abandonnées, je serai allée jusqu’au bout.

Depuis cette expérience, je me demande souvent l’intérêt du Québec de recruter des immigrants qualifiés si finalement on ne reconnaît même pas les matières élémentaires du secondaire ? Je rencontré des immigrants qui retournent à l’école pour étudier les même choses car il n’ont pas de diplômes d’ici. On a ce goût amer de ne pas être reconnu. Je ne pense pas qu’à moi mais à tous ceux qui voit leur qualifications reniées. J’ai l’impression que la politique d’immigration est en total décalage avec la réalite que les immigrants rencontrent pour la reconnaissance de leur vécu. J’ai voulu appliquer pour un M.B.A à l’Université de Sherbrooke mais je me suis fait dire que mon expérience professionnelle aux États-Unis (stage) et en France n’était pas reconnue et qu’il fallait avoir au moins deux ans d’expérience significative au Canada. Mais pour avoir une expérience significative au Canada sans diplôme canadien, c’est plus difficile. Pas impossible. On tourne en rond.

J’ai voulu partager cette expérience avec vous car sur divers sujets, on ne sent pas forcement concerné, pourtant le temps nous rattrappe. J’ai dépensé énormement d’énergie dans ce projet qui m’a beaucoup tenu à cœur et duquel j’ai de la difficulte a me détacher. Pourtant, j’ai vécu une expérience très enrichissante pendant laquelle j’ai rencontré beaucoup de femmes fortes et inspirantes. J’ai beaucoup appris, sur pleins de choses.

Je ne serai donc pas Sage-Femme, …. à moins d’un miracle.

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