On immigre tous au Québec pour des raisons personnelles. On sait ce qu’on cherche, on sait ce qu’on attend, on sait pourquoi on part. Mais pourquoi est-ce qu’on repart ?
Depuis que je suis de retour en France, mes amis me demandent souvent : « Mais qu’est-ce que tu trouves si bien au Québec que tu ne trouves pas ici ? » C’est vrai, il faut dire ce qui est on est quand bien en France. On a de la bonne bouffe, une excellente couverture sociale, un hiver humide, certes, mais court et pas trop froid, la plupart de mes amis travaillent et vivent très bien. Et pourtant, mon désir de repartir se confirme de jour en jour. Je n’ai jamais voulu comparer la France et le Québec parce que je trouve ça stérile. Chaque pays a ses défauts et ses qualités. C’est à nous qu’il convient de déterminer le pays où l’on veut vivre selon qui on est et ce qu’on attend de la vie. Il faut aussi se demander si on sera capable de vivre l’éloignement pour toute une vie. Si on sera capable d’avoir des enfants et de les élever sans avoir nos parents à nos côtés.
Ce sont ces aspects-là qui me font hésiter à repartir illico. Mes parents sont nés en Guadeloupe, ils ont déménagé en France où je suis née. De ce fait, je n’ai jamais eu de relation très proche avec mes grands-parents, oncles, tantes et cousins et ça m’a manqué. Si j’ai des enfants au Québec, ils vont devoir vivre ce que j’ai vécu et je trouve ça triste. Ceci étant, il y a une grande partie de moi qui est restée au Québec et qui m’appelle.
J’aimais beaucoup me dire que j’étais une Québécoise en devenir quand je vivais là-bas. Tous les lundis soirs, j’étais rivée à mon écran pour voir Tout sur moi, les mercredis c’était pour Les invincibles. Dans ma voiture, les cd de Mes Aieux tournaient en boucle. Dans ma bibliothèque, il y avait le dernier livre de Nadine Bismuth. Et dans mon frigo… Non, dans mon frigo, il y avait du camembert qui pue et du saucisson sec ! Je n’ai jamais oublié mes racines françaises mais je me suis laissée emportée par tout un monde que je ne connaissais pas. C’est ça qui me manque, je crois. J’ai une impression d’inachevée. Mon histoire avec le Québec n’est pas finie.
O.K, je vous arrête tout de suite, non, je n’ai pas envie de retourner au Québec pour pouvoir voir la suite de Tout sur moi ! Ce que je dis, c’est que j’ai envie de continuer mon exploration de la société québécoise et que surtout, par rapport à ce que j’ai envie de faire de ma vie, j’ai l’impression que le Québec me convient mieux. Pourquoi ? Parce qu’en 4 ans là-bas, j’ai accompli plus de choses qu’en France en 25 ans. Bon, on ne comptera pas les 18 premières années parce qu’à part aller à l’école, on ne fait pas grand-chose. Mais les faits sont là. Je me suis réalisée au Québec.
Je ne dois pas tout à ce pays. Mes réussites, j’ai été les chercher. On ne m’a pas donné mon MBA pour mes beaux yeux, on ne m’a pas embauché pour mon sourire ensuite. J’ai travaillé, beaucoup, mais je dois reconnaitre qu’on m’a donné la chance de faire mes preuves. Que ce soit au travail ou avec mon roman d’ailleurs, on m’a donné ma chance. En France, tout le monde n’hérite pas des mêmes chances à la naissance.
Ah, honte à moi, j’ai fini par comparer la France et le Québec ! Difficile d’y échapper. Mais, quand on a l’opportunité de choisir entre deux pays, de décider quel côté de l’Atlantique est le plus beau vu de nos yeux, il ne faut pas gâcher ça. Alors, oui, il m’arrive de comparer, mais jamais je ne dirai le Québec, c’est mieux que la France ou la France, c’est mieux que le Québec. Jamais je ne dirais la France est un pays de m….. ou l’inverse. La seule chose que je dis, c’est que le Québec m’a donné ma chance. C’est tout.
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