Bon, première chronique de ce côté-ci de l’Atlantique. Et, en ce 19 juillet 2010, cela fait 5 ans, jour pour jour, que je suis arrivée au Québec avec un permis d’études. Il s’en est passé des choses en 5 ans ! Si j’étais arrivée en tant que RP, je serais Canadienne à l’heure qu’il est. Ce sera donc pour dans 3 ans ! Mais, même si je ne suis pas encore citoyenne du Canada/Québec, je suis maintenant convaincue que mon avenir est ici. Peut-être pas jusqu’à la retraite mais en tout cas pour un long, long moment. D’ailleurs, à peine deux semaines que je suis là et voilà mon accent français totalement évaporé ! Quand je suis allée récupérer mes boites qui arrivaient de France à l’aéroport la semaine dernière, les employés ne voulaient pas croire que j’étais Française. Je suis un caméléon, faut croire.
Que dire, donc, de cette année passée en France qui s’est transformée malgré moi en une année sabbatique consacrée à l’écriture de mes romans ? Que je ne regrette pas de l’avoir vécue. Les choses ne sont peut-être pas passées comme je l’espérais mais il fallait que j’en passe par là. J’ai pu profiter totalement de ma famille et de mes amis, du fromage et du vin pas cher et confirmer une décision prise il y a 5 ans : partir pour découvrir, ou aujourd’hui, repartir pour redécouvrir.
Je suis quand même triste de voir que mon pays n’arrive pas à procurer un avenir enrichissant et stimulant à une majorité de jeunes diplômés. Je sais que c’est la crise, mais c’était déjà comme ça bien avant son arrivée. J’ai un bac + 5 et 3-4 ans d’expérience dans mon domaine et tout ce que je trouvais, c’était des postes d’assistante, payé à peine plus haut que le smic, et évidemment, il ne fallait pas compter sur un poste permanent. Sans compter que mon âge (j’ai 30 ans, je suis une femme, je vais faire des enfants et partir en congé dans les prochaines années) et ma couleur de peau (j’ai envoyé des cv sans photo et les réponses étaient deux fois plus nombreuses) ne jouaient vraiment pas en ma faveur. La France ne se rend pas compte de la richesse qu’elle perd.
Avant de partir, je suis tombée sur l’émission : Complément d’enquête sur France 2. À un moment, un jeune ingénieur d’origine Magrébine qui ne trouve pas de travail explique que c’est la France qui est perdante dans la situation : elle forme ses étudiants plus ou moins gratuitement, l’université ne coûtant presque rien, et ensuite elle laisse partir ces jeunes intelligents et prêts à s’investir dans leur boulot à l’étranger parce qu’elle ne les embauche pas. En somme, elle nous empêche de lui rendre ce qu’elle nous a donné. C’est tellement vrai.
J’ai une amie qui a une licence en anglais et qui travaille comme caissière depuis 3 ans. Une autre qui est secrétaire avec une maitrise en ressources humaines. Un autre qui est chef de rayon avec un diplôme d’ingénieur. Leur potentiel n’est tellement pas exploité que ça me fait mal au cœur. Si je suis repartie au Québec, c’est parce que je ne voulais pas entrée dans ce cercle : être assistante RH et attendre 3 à 5 ans avant de retrouver un emploi équivalent à celui que j’ai eu en sortant de l’université au Québec ? Car c’est exactement ce qu’on m’a dit dans plusieurs entretiens d’embauches. Merci, mais non, merci.
Je suis ici depuis deux semaines, je n’ai même pas encore commencé à envoyer de cv que j’ai déjà deux jobs en vues, mon réseau professionnel était au courant depuis un moment de mon retour à Québec. Que demander de plus ? Je me suis souvent demandé pourquoi j’avais laissé la proie pour l’ombre en revenant en France l’année dernière. Ce n’est pas comme si j’ignorais que trouver un travail allait être difficile, mais il fallait que je vienne voir par moi-même la situation. Je suis venue, j’ai vu et… j’ai été vaincue ? comme aurait dit Jules César s’il avait perdu son combat.
Je ne sais pas. Ce que je sais, c’est que je n’ai plus envie de me battre pour avoir un travail, un appartement, et des gens compétents dans les administrations. Oui, je suis triste d’avoir laissé (encore) ma famille et mes amis. Oui, le Québec a ses côtés négatifs (l’hiver, l’hiver, et, euh, j’ai dit l’hiver ?) mais je me sens mieux ici. C’est comme ça. Et puis maintenant, quand je retournerai en France, ce sera en tant que touriste et je pourrai apprécier le meilleur de mon pays, sans les inconvénients.
Sur ce, un bon été à vous tous et rendez-vous à la rentrée !
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