Souffrez-vous du manque de statut social au Québec? - Immigrer.com
jeudi , 21 novembre 2024
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Souffrez-vous du manque de statut social au Québec?

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Soigner la souffrance de la petite vie

Il y a quelques temps, j’avais écrit sur le forum que les trois grandes raisons qui faisaient retourner les français du Québec en France étaient :

  • la rudesse du climat ;
  • l’éloignement de la famille ;
  • le mode de vie « américain ».

et qu’on ne pouvait pas leurs en vouloir car avant d’avoir vécu ces situations il était difficile d’en connaitre l’impact sur soi-même.

Cependant, ma liste de raisons occultait un facteur important, le plus important peut être: l’emploi.

En bon idéaliste cet aspect ne me paraissait pas prépondérant, et pourtant…

Car si les français sont particulièrement attachés à leur travail c’est qu’avec un emploi vient un salaire bien sur, mais surtout un statut social.

Or en France, vieille société hiérarchique1, la réussite sociale reste associée à la conquête d’un statut aussi irréversible que possible. Soit vous passez, soit vous échouez : prépa ou fac, CDI ou CDD, cadre ou pas cadre, cela commence à l’école et finit à la retraite2.

Si on en croit un sondage de 2015, « progresser dans sa carrière » serait la première raison qui inciterait les français de tous âges à s’expatrier. « Avoir un meilleur niveau de vie » y était cité autant de fois que « voyager, découvrir, partir à l’aventure »3.

L’avis de Walden85, que je partage, c’est que ce qui motiverait un grand nombre de français ayant le Québec en ligne de mire ce n’est pas tant l’expérience de l’étranger, la nature, les grands espaces ou autre noble quête, mais bien la souffrance de la petite vie en France.

Et ils ont raison car figurez-vous qu’immigrer permet de soigner ce mal ! En effet, immigrer c’est se déplacer dans l’espace physique mais aussi dans l’espace social4.

Je m’explique :

  1. Quitter la métropole permet d’obtenir un nouveau statut en France.

Rien d’autres à faire que de poser le pied de manière « permanente » en dehors de l’hexagone et déjà vous montez dans la hiérarchie sociale française. Vous gagnez cette différence par rapport à la masse tant désirée.

Si vous ne me croyez pas, interrogez vos concitoyens et vous verrez que « c’est mieux ailleurs » est au moins aussi répandu que « c’était mieux avant ». Un statut d’expat fait des envieux !

Mais n’est ce pas quitter un mal pour un autre ?

Oui mais…

  • À l’étranger, le statut français n’a plus cours.

Combien de Français ai-je rencontré au Québec qui chialaient que leur précieux diplôme, en fait le titre qui venait avec, n’était pas suffisamment reconnu ? Leur niveau de vie n’était pas moindre, mais leur ego en prenait un coup.

Pourtant n’est ce pas une chance de vivre loin de la pression de ses semblables, loin des codes qu’on prenait pour norme universelle ?

Tout comme des sacres québécois nous font longtemps sourire plutôt que nous offensent, la hiérarchie sociale du pays d’accueil nous paraît toujours quelque peu étrangère.

Ici nous sommes et resterons des immigrants. La première génération. Mais pris entre deux mondes, l’ancien et le nouveau, nous avons la possibilité, au pays du multiculturalisme qui plus est, de valoriser l’un et l’autre.

Devenir expat ne saurait cependant être suffisant, car le besoin de reconnaissance qui hante les français trouve aussi son accomplissement dans des valeurs matérialistes.

  • Au Québec, l’immobilier est moins cher qu’en France et le crédit plus facile d’accès.

À condition que le salaire soit au moins équivalent, l’expatriation est financièrement gagnante. Sans parler du taux de change favorable si vous avez des économies en euros.

Or, on a beau ne pas se l’avouer, mais une vie « meilleure » est très souvent synonyme de pouvoir d’achat.

Beaucoup de français, dont certains de mes amis, ont trouvés ici cet épanouissement : bons salaires, grosses maisons en banlieue, grosses autos dans l’allée, vacances en Floride…

Le tout savamment distillé sur les réseaux sociaux pour attiser la jalousie de leurs semblables restés au pays. Jalousie qui valide la pertinence de leurs choix.

Des choix pourtant au prix, souvent, de moindres avantages sociaux. En effet, rares sont ceux, au Québec, qui commencent une carrière avec cinq semaines de congés payés par exemple.

Cependant, la ou on pourrait croire pragmatiquement à un rééquilibrage, cette situation trouve aussi écho en France. N’est elle pas l’incarnation du feu Sarkozysme triomphant (« travailler plus pour gagner plus ! ») et du Macronisme actuel (« que le surcroit de travail accepté entraine un surcroit de salaire. ») ?

Moi aussi je dois avouer que je vie cela. Bon, la banlieue, les autos et Facebook en moins. Version bobo quoi. Sans aller jusqu’à devenir plateauzoaire, faut bien que je sauve la face. Je vous épargne la nature, les grands espaces et tout le baratin…

Conclusion

Immigrer est une forme de mobilité sociale dans le pays d’origine comme dans le pays d’accueil4.

Ces français dont je parle sont la moitié silencieuse des résidents permanents. Ceux qui ne repartent pas en France et qu’on lit rarement sur les forums. Ceux qui, par chance ou par persévérance, ont gagné un statut social valant bien la rudesse du climat, l’éloignement de la famille et le mode de vie « américain ».

Si vous souffrez de la petite vie, d’une mobilité sociale contrariée, d’un quotidien trop pesant, considérer l’émigration est parfaitement légitime. Ne serait-ce qu’envisager une autre vie fait renaitre l’espoir évanoui d’un avenir meilleur.

Bien sur passer du rêve à la réalité, changer de paysage, de métier et d’entourage est toujours une épreuve. Quelque soit la distance d’ailleurs.

C’est beaucoup plus risqué quand vous êtes un couple avec une carrière et des enfant que quand vous êtes célibataire et fraîchement diplômé car vous mettez beaucoup plus en jeu mais dans tous les cas il y a un gain social à tirer de l’expatriation.

Quand on me demande en France pourquoi j’ai émigré, j’aime répondre que « quitte à être un guignol, autant être un guignol à l’étranger, au moins j’ai l’excuse d’être un immigrant ! »

Sources :

1 :             Eric Maurin, La peur du déclassement. Une sociologie des récessions, Seuil, 2009, 93 p.

2 :             https://lexpansion.lexpress.fr/actualite-economique/la-peur-du-declassement-touche-les-plus-favorises_793257.html

3 :             https://www.capital.fr/votre-carriere/expatriation-quelles-raisons-poussent-les-francais-a-partir-a-l-etranger-1133409

4 :             François Héran, Pourquoi migrer ?, Les Cours du Collège de France, 2019. (https://www.college-de-france.fr/site/francois-heran/course-2018-2019.htm)

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Écrit par
Marty

Né au nord de la France, j’ai grandi à Cambrai, ville probablement plus célèbre au Canada que dans son propre pays. Fasciné, comme tant d’européens, par l’Amérique depuis toujours, j’ai voyagé et vécu aux Etats-Unis avant d’arriver à Montréal début 2012. Biochimiste de formation, je travaille dans mon domaine au Québec.

5 commentaires

  • Personnellement, j’estime que j’ai réussi à bâtir ma vie sociale au Québec car j’ai environ une vingtaine d’amis seulement québécois que j’arrive à voir régulièrement. Je pense aussi que c’est parce que je suis partie à 28 ans, aujourd’hui j’en ai 34. Je pense qu’arrivé dans la trentaine c’est moins facile de se faire des amis. Ce qui m’a beaucoup aidée là dedans c’est également me faire des amis à partir de la musique, une activité/passion commune, c’est plus facile de créer des liens, vraiment. Même quand j’étais en France, tous mes amis (moindre qu’au Québec) viennent de la musique, sauf mon meilleur ami rencontré au lycée.

  • Belle analyse! nous sommes revenus en France après 12 ans et avec nos 3 enfants mais je dis à mes enfants si vous galérez en France retournez au Canada pas de soucis pour nous même si c’est loin, bien sûr nous sommes tous devenus canadiens au cas où…hihihihi

  • Centre Éducatif

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