De Carla Belgo-Indo
Bonjour, je voudrais partager mon expérience d’installation au Canada avec tous ceux qui, comme mon conjoint et moi, se considèrent comme des nomades des temps modernes, poursuivis par un profond sentiment de déracinement et par un désir utopique de trouver un jour leur véritable« chez soi ».
Notre histoire à nous a commencé par ce grand désir de partir à l’aventure, comme pour la plupart d’entre vous, avec cette particularité que nous recherchions un endroit où nous nous sentirions enfin « chez nous ». Pour lui comme pour moi, la première vie (en Europe) avait consisté en une succession de confrontations culturelles du fait que nous étions tous les deux nés d’un mariage mixte avec des traditions et manières de vivre/faire totalement différentes : moi, à cheval entre des cultures belge et indonésienne, et lui, né d’un mariage corso-breton expatrié depuis plus de 15 ans en Belgique. À côté de la manifeste fuite en avant qu’a été l’immigration, il y avait donc le projet de couple de bâtir un foyer à l’image de nos valeurs, tout en continuant de découvrir le monde à deux.
Dans l’ensemble, l’installation au Canada a été très facile. Il est vrai que les deux années d’attente pour obtenir le CSQ et ensuite la RP ont parfois paru bien longues. Mais dans notre cas, elles nous ont surtout permis de préparer notre immigration au maximum (accumuler des économies, établir un plan d’action pour l’arrivée et la recherche d’emploi, nous préparer psychologiquement au départ et préparer nos proches en parallèle, déterminer si nous n’étions pas en train de faire la boulette de notre vie en décidant de tout quitter, etc.).
Cependant, les choses se sont enchainées très vite une fois arrivés sur place. Paperasse il y a eu bien entendu, mais tout a fini par aller relativement vite entre le logement de courte durée, le premier emploi, le logement à plus longue durée, l’emploi plus stable, la première carte de crédit (woohoo), le premier cercle de copains, les festivals d’été et les BBQ dans les parcs, ou tout simplement les nouveaux repères (pour moi, cette merveilleuse bibliothèque gratuite de l’UQAM et mon meilleur ami, le marché PA). Je remercie d’ailleurs du fond du cœur les deux agences de placement qui m’ont vue comme un potentiel plutôt que comme une personne sans expérience canadienne, et aussi toutes ces personnes qui ont décidé de nous faire confiance (premier proprio, employeur, coiffeur, j’en passe) ou de nous introduire à leurs cercles d’amis (merci les pottos).
Bien sur, tout n’a pas été rose pendant ces 2 premières années. L’éloignement familial fut un véritable déchirement et le premier hiver canadien, une grosse tarte dans la figure. En plus d’avoir un mal de chien à me faire des amis québécois (moi, de nature résolument timide), j’ai pu expérimenter mes premières déceptions amicales avec les immigrés, à savoir la grande désillusion liée aux nouvelles amitiés très rapides, très nombreuses…et très superficielles. Ajoutez à cela le fait que, dans un couple, on ne vit jamais l’immigration de la même manière ni au même rythme, …les crises de larmes ont été nombreuses et cycliques.
Cela dit, après deux ans de montagnes russes émotionnelles, je suis fière de dire que nous sommes les heureux propriétaires d’un condo et que nous nous sentons plus épanouis que jamais en tant que couple…à tel point qu’un bébé en chemin. En vérité, j’ai encore du mal à me dire que je rentre « à la maison » quand nous arrivons à Montréal au retour d’un voyage. J’ai même du mal à me projeter 10 ans en avant, géographiquement parlant (qui sait si nous ne finirons pas à cultiver la canne à sucre en Uruguay). Une chose est sure, je me sens mille fois mieux dans ma peau par rapport à mon trouble identitaire (celui lié à mes racines, je vous rassure, je ne suis pas bipolaire, lol). Ici, j’ai trouvé un rythme de vie très doux, une liberté de vivre comme je l’entends et un endroit sécuritaire où faire grandir mon enfant.
Mon grand défi à venir sera incontestablement l’éducation de mon petit. Comment faire pour que celui-ci se sente bien sur cette terre où il sera né, au vu du boxon multiculturel dont il sera issu? Je voudrais croire de tout mon cœur qu’il sera tout à fait possible pour lui de se sentir Canadien, voire Québécois, tout en gardant une attache sincère aux multiples racines de ses parents. Imaginez-vous…nous aurons trois accents francophones différents à la maison…belge, français et québécois. En tous cas, je veux y croire et j’y travaillerai.
Merci pour la lecture et sincères salutations à tous!
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