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Bilan de nos 2 ans à Montréal

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18 avril 2016 – 18 avril 2018

Il y a deux ans pile, nous débarquions au bureau de l’immigration de Montréal-Trudeau, pour valider nos résidences permanentes. Une journée qui a changé nos vies et qu’on n’est pas prêts d’oublier !
Tout avait commencé un soir de déprime, arrosé d’alcool, à l’automne 2013. Bilan de nos vies actives respectives, stagnation de poste et de salaire pour moi, cadre dans une grande entreprise industrielle française, et pour mon mari, une startup au bord du dépôt de bilan, faute d’investisseurs, devenus trop frileux dans un pays enfoncé dans la crise économique. A cela s’ajoutait la vie francilienne et ses désagréments quotidiens, transports, pollution, insécurité, grèves, et j’en passe… Et quel avenir ici pour notre fille, qui n’avait alors pas 5 ans ? Et au fil de nos discussions, une idée folle était en train de naître : pourquoi pas partir au Québec ? On avait déjà regardé des reportages, ça avait l’air simple, et on s’y voyait déjà dans 6 mois !
Le lendemain, l’idée ne s’était toujours pas envolée, et mon mari me ramenait à la maison le fameux livre de Laurence Nadeau, « S’installer et travailler au Québec, édition 2013 ». Commence alors, comme pour tout le monde ici, le parcours du combattant, jalonné d’intentions de rejet et de rude épreuve pour notre patience . C’est seulement deux ans plus tard, en décembre 2015, qu’on recevra dans notre boite aux lettres les précieuses CRP, notre sésame pour une nouvelle vie !
Peu de temps après, une bonne nouvelle tombe : mon mari obtient une offre d’emploi en informatique après avoir passé des entretiens aux Journées Québec à Paris en novembre. Tout s’accélère, on organise le déménagement avec Galieni, on vend nos meubles, nos voitures, on achète les billets d’avions pour toute la famille, y compris notre chat qui voyagera en soute. On s’occupe également de trouver une école pour notre fille, et une fois sur place, on trouvera un 4 1/2 à louer juste à côté.
De mon côté, j’avais établi plusieurs contacts avec des employeurs potentiels via linkedIn, et à mon arrivée en avril, je passe plusieurs entretiens, et j’obtiens rapidement un travail dans une grande institution financière québécoise. Je retourne seule en France quelques mois pour finir l’année scolaire, et reviens définitivement début juillet avec ma fille.
Niveau administratif, le Québec est incroyablement efficace. NAS, RAMQ, SAAQ, tout se fait à chaque fois en quelques dizaines de minutes, et on est impressionnés par la gentillesse du personnel, qui nous explique tout en détail, et avec le sourire ! Il faut dire qu’on sortait de 2 mois d’affronts, coups de gueule et médiation avec la CPAM des Yvelines qui refusait de nous délivrer le formulaire SE401-Q207 (celui qui nous permet d’être couverts par la RAMQ dès notre arrivée), et qui avaient osé nous dire au téléphone, sic : « si ça ne vous plait pas vous n’avez qu’à pas partir au Canada ! « . Heureusement, l’extrême efficacité de l’administration québécoise nous fait vite oublier cette mésaventure ;)
Depuis notre arrivée, peu de choses nous ont déçu. Il faut dire qu’en deux ans et demi d’attente, nous avons eu largement assez de temps pour nous préparer. Comprendre la culture québécoise, connaitre l’histoire, les lois, les démarches, le format des CV, le système bancaire, apprendre les expressions locales, s’habituer à l’accent en écoutant les web radios… On peut dire, en empruntant une expression québécoise, qu’on était « pas mal prêts », avant de monter dans l’avion.
Il y a encore quelques petites choses qu’on a appris sur place, et qui nous font sourire en y repensant, comme par exemple, ma fille qui rentre de son premier jour d’école en nous disputant parce qu’on ne lui avait pas donné de souliers d’intérieur : oui, toute l’année, même l’été, il y a les chaussures pour dehors et les chaussures pour la classe. Ici, c’est comme ça que ça se passe ! Et dans le même esprit, on ne garde jamais ses chaussures dans une maison, même quand on est invités, on les retire toujours à l’entrée, heureusement qu’un ami Français immigré de longue date nous avait prévenu !
Mois après mois, la routine s’est installée, et on a vite eu l’impression d’être ici depuis toujours ! Mais cette routine-ci est nettement meilleure que la précédente. Sortis à 16h30 chaque soir, chez nous à peine 30 minutes plus tard, on a gagné du temps de qualité tous ensemble en famille.
Alors bien sûr, il y a l’hiver ! Notre deuxième hiver tente désespérément de s’achever, et on a hâte de pouvoir ranger les manteaux en duvet, les tuques et les mitaines ! Cet hiver a d’ailleurs été un peu plus éprouvant que le précédent, beaucoup de neige, et une longue période de froid extrême début janvier, qui nous a valu des canalisations gelées, et plus d’eau dans la cuisine pendant 24 heures… Mais nous ne nous plaignons pas trop, Montréal est largement épargnée par les gros désagrément de l’hiver, comparée à la ville de Québec ou au Saguenay. Les grands axes sont rapidement dégagées, et les écoles rarement fermées (un jour par hiver depuis notre arrivée). Et on adore les anneaux de patinoires extérieures qui apparaissent un peu partout dans les parcs, de bon moments à passer en famille quand il ne fait pas en bas de -15° !
A l’inverse, l’été est agréable et chaud, le ciel souvent bleu (comparé à Paris…), et l’été indien s’étire jusqu’à la fin octobre : il n’est pas rare de se promener en manches courtes à cette période de l’année. Mais on passe de l’été à l’hiver en deux ou trois semaines. Je me souviens qu’en novembre dernier, on a perdu quelque chose comme 25 degrés en deux jours.
Mais Montréal a son charme, été comme hiver. Même dans le froid, de nombreuses festivités se déroulent un peu partout, pour tous les âges et tous les goûts. Et l’été, c’est encore plus animé : on sent que les Québécois ont à cœur de profiter de chaque minute de chaleur, pour recharger les batteries avant la prochaine hibernation ;)
Mais parlons d’un sujet un peu plus sérieux : le travail. Je lis des choses parfois horribles sur le forum, mais heureusement, ce sont des cas isolés, ou tout simplement des immigrants qui n’ont pas su s’adapter: il y en a plus qu’on ne le croit ! De notre côté, dans nos jobs respectifs, on apprécie vraiment l’ambiance de travail. On se sent utiles, valorisés, efficaces, pas grand chose à voir avec la France. Ici, pas question d’heures sup’ à n’en plus finir, mais on attend de vous de l’implication et de l’autonomie, et on vous demande même souvent votre avis (oui, au début, ça fait bizarre, mais on s’habitue vite… ;) ). Et pour passer haut la main l’étape du recrutement, c’est vraiment important de bien rédiger son CV à la québécoise, en mettant en avant les réalisations qu’on a accomplies dans le passé, et ce qu’on recherche dans notre futur emploi. Le CV peut être long et détaillé, mais pas la peine d’écrire qu’on est marié 2 enfants 1 chien, ni qu’on est passionné de pétanque. Par contre, si vous avez fait du bénévolat, ou si vous êtes engagés activement dans une grande cause respectable (environnement, éducation, humanitaire…), vous pouvez le noter, car c’est très bien vu par ici ! Et si vous avez une passion directement liée à votre métier, bien évidemment, mettez-la ! Dans 99% des cas, on vous demandera des références, donc il faut espérer que votre ancien chef vous apprécie, parce qu’il va avoir un long questionnaire à remplir sur la qualité de votre travail et votre personnalité.
Une fois retenus pour un entretien, apprêtez-vous à passer à la laveuse en mode essorage. Ça va être long et difficile. Les recruteurs voudront voir ce que vous avez dans le ventre, et si vous avez vraiment le profil pour le poste. Finis les CV maquillés, ici vous serez rapidement démasqués. Si votre entretien ne dure que 15 minutes, attendez-vous à ne pas être rappelés. Mais avec un taux de chômage très bas, il est quand même probable que vous n’ayez pas trop de difficultés à trouver un emploi en quelques mois, même si ce n’est pas exactement le poste que vous recherchiez. Et ici, ce n’est pas du tout mal vu de partir rapidement pour un autre emploi. Ça m’avait choqué au début, mais je commence à m’habituer : une personne qui trouve mieux ailleurs aura juste deux semaines de préavis à respecter, et personne ne va lui en vouloir, pas même le manager, ça fait partie du jeu.
Pour ceux qui le souhaitent (ou qui n’ont pas le choix si leur métier est régit par un ordre professionnel), ici ce n’est pas du tout mal vu de reprendre ses études à l’âge adulte, c’est même très répandu. Et surtout, c’est un moyen sûr de trouver un emploi par la suite, car la formation québécoise sera immédiatement reconnue par les employeurs québécois. De notre côté, on a de la chance, on a pu trouver un travail sans repasser par la case études, nos diplômes et notre expérience en France ont été suffisants.
Pour les enfants aussi, l’école ici est très différente de la France. Beaucoup moins de devoirs (au primaire), et des cours très ludiques : on joue pour apprendre. Une méthode pédagogique qui a fait ses preuves: ici, les enfants sont plus épanouis et heureux d’aller à l’école, et ils ont même une belle avance sur le programme de France. Un seul bémol : ils ont des cours obligatoires d’éthique religieuse, où finalement, ils parlent de toutes les religions… sauf l’athéisme ! A la fin, les enfants s’imaginent qu’il est obligatoire de choisir une religion, et se sentent exclus quand ils n’en ont pas… Mais voyons le bon côté des choses, ça nous a permis d’aborder le sujet en famille à la maison, pour mieux expliquer nos choix.
Autre point à ne pas négliger, si vous souhaitez que votre enfant apprenne l’anglais dès le primaire (au cas où ça lui servirait plus tard, sait-on jamais…), il vaut mieux choisir une école privée avec une filière d’anglais renforcé, car ici au public, c’est comme en France, seulement 1h par semaine pendant les 6 années de primaire, alors ça ou rien… Et bien entendu, pour nous francophones, les écoles anglophones sont tout simplement interdites d’accès, c’est bon à savoir, car beaucoup de parents débarquent à Montréal en pensant que leur enfant aura facilement accès à un enseignement bilingue dans le public, et finalement, c’est la désillusion. Mais a Montréal, il y a beaucoup de choix pour les écoles privées, et les prix varient de 3000 à 30000$ par année, de quoi trouver son bonheur :)
Dans notre cas, le choix de l’école nous a amenés à nous installer dans un coin tranquille et agréable de l’ouest de l’île de Montréal. Beaucoup de Français vont s’installer sur le plateau, complètement à l’opposé. « Du coup », ici, on ne croise pas beaucoup de Français : il y a en majorité des anglophones et des immigrants asiatiques, et aussi des Québécois francophones. Le bord du lac Saint Louis est à quelques centaines de mètres, on aime s’y promener été comme hiver. C’est certainement l’un des plus beaux coins de l’île, mais peu de gens le connaissent.
Alors bien sûr, habiter loin du centre-ville rend l’achat (ou leasing) d’une auto indispensable. Les trains de banlieue passent entre deux et trois fois par heure aux heures de pointe, et on peut aussi compter sur quelques lignes de bus express passé 18h30. Mais ici, les transports sont très ponctuels dans l’ensemble, c’est très appréciable. Pour aller au centre ville en voiture, notre passage obligé est l’échangeur Turcot. En travaux depuis notre arrivée, on le voit évoluer chaque jour, et ça devrait encore durer au moins deux ans. Cela cause quelques ralentissements, mais rien d’insurmontable quand on débarque de l’île de France… Mais les Québécois, eux, sont scandalisés par tant de travaux. L’île est recouverte de gros cônes oranges, devenus l’emblème de la ville, presque autant que le 1000 gauchetière ou le pont Jacques Cartier. Mais je reste persuadée que ces travaux sont une bonne chose, la ville en avait vraiment besoin ! Ils vont fluidifier nos trajets et dynamiser cette belle et grande capitale d’Amérique du Nord.
On se sent bien dans notre West Island, alors en janvier dernier, on y a acheté une maison, dans un programme de constructions neuves. On est vraiment contents de notre investissement. Avec 18 mois d’historique de crédit et un statut de résidents permanents, on n’a eu aucun mal à avoir une hypothèque au même taux que n’importe quel Canadien. Mais ça ne nous a pas empêché de magasiner les banques et courtiers, pour faire marcher la concurrence, et finalement, notre banque s’est alignée sur le meilleur taux, nous a offert les frais de notaire, et maintenant on ne paie plus aucun frais bancaire mensuel, c’est vraiment un bon deal.
Au bilan, deux années merveilleuses, aucun regret, une excellente intégration pour nous autant que pour notre fille, de belles expériences, de belles rencontres avec les Québécois qui sont tellement gentils, accueillants et généreux avec nous! Mais pour nous, ce sont aussi de nombreux voyages à travers le Canada et aux USA (l’un de mes rêves avant d’immigrer!), et pour finir, nous avons fait comme tout bon Québécois, le printemps refusant d’arriver, nous avons décidé de partir une semaine à Punta Cana ! Il paraît qu’il neige encore à Montréal, ce 18 avril 2018, mais moi je ne le vois pas, car je termine d’écrire ces lignes au bord de la piscine, sous le soleil des Caraibes, par 28 degrés Celsius !
Bonne semaine à tous! Et je souhaite que vos projets se réalisent autant que les miens!
:)

Récit de  Isa78 dans le forum

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5 commentaires

  • Très beau texte, Isa. Je suis liseuse par hasard, n’ayant pas l’intention d’émigrer (je l’ai déjà fait en quelque sorte, je suis francaise et vis an Allemagne depuis ma jeunesse, je suis donc également expatriée si on veut…).
    Je suis tombée sur ce site de fil en aiguille par hasard (que je lis avec beaucoup d’intéret) et j’ai beaucoup apprécié votre récit qui me semble témoigner d’une vitalité et ouverture d’esprit admirable. Votre style est très posè et très agréable à lire, authentique et franc. Je vous souhaite à vous et à votre famille d’excellents jours à venir. Merci d’avoir partagé votre vécu.

  • C’est avec delestation que j’ai dévoré votre texte très intéressant et captivant . Madame, vous etes un as et vous me donnez la le courage d’immigrer au Canada! J’ai toujours suivi avec intérêt la vie au Canada! Je sais que c’est une société inclusive ou tout immigrant est intégré, tel est le but ultime de l’immigration canadienne. Je vis actuellement aux USA mais je rêve d’ici peu d’immigrer au Canada qui est planté dans mon coeur!!!

  • Intégration parfaitement réussie!!! Il suffit d’être positif au départ, je pense! Si on arrive ici en « chiâlant » on repart… en chiâlant! Bravo madame! Des Français comme vous on en veux « à la tonne! »

  • Mille bravos au jeune couple « Isa78 » et leur intégration si réussie. Bien sûr, le fait d,avoir vite trouvé du boulot tous les deux y est pour beaucoup. Je sens chez vous un grand esprit positif, et de la curiosité pour ce nouveau continent.
    Une franco-québécoise qui a…56 années de vie à Montréal, qui ne regrette pas son immigration vécue seule à 23 ans, et qui aimerait vivre son dernier soupir en terre natale, oui, la France, pour sa douceur du climat sur ses vieux os de 80 années.
    Marie-Fr.

  • J’ai eu envie en lisant ce message qui me fait garder espoir. Nous n’avons peut être pas les mêmes chances. Je suis ici au Canada depuis près de 9 mois en tant que visiteur, je voudrais obtenir un permis de travail et lorsque j’ouvre le site immigration je ne trouve pas de formulaire de demande de permis de travail. J’ai passé près de 7 mois à faire du bénévolat et à faire de l’apprentissage dans la fabrication des bijoux, le tricotage, et broderie … ceci pour meubler mon temps et éviter l’oisiveté. Je ne sais pas si ça sera possible pour moi d’obtenir ce permis pour le reste de temps pour les 5 années dont j’ai bénéficié du visa. Je lance un appel pour une aide à la procédure d’obtention du permis de travail. Merci de l’aide.

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