Bonjour,
Ah le français et le Québec, quel débat!
Je dois dire tout de suite que c’est une question qui est très passionnée ici au Québec. Moi-même québécoise, je suis toujours choquée par le français de certains de mes compatriotes. La question est très complexe et cela fait partie de ces choses qu’on ne comprend pas tout de suite lorsqu’on arrive. Oui, une élite québécoise parle et écrit bien le français, comme dans tous les pays, les élites sont instruites. Le langage québécois est un mélange d’ancien français, de français moderne avec de l’influence de l’anglais. En fait, ceux qui font des erreurs et ceux qui défendent la langue française au Québec NE SONT PAS LES MEMES! C’est cela, justement, le paradoxe! C’est ceux qui enseignent, aiment, lisent, et utilisent le français à outrance…qui en sont les ardents défenseurs. Alors que faut-il faire, baisser les bras et se dire que cela ne vaut pas la peine de défendre un français pourri? Non je ne pense pas. Il est vrai que dans ma vie au Québec, j’ai parfois été confronté à des situations allucinantes. Un professeur de mathématique qui faisait des erreurs au tableau et qui se défendait en disant qu’il n’enseignait pas le français mais les maths! C’est pas croyable! Puis certains vous diront que le français parlé à Montréal est beaucoup moins bon que celui à l’extérieur de Montréal, dans le reste du Québec. Ce qui donne peut-être une perception déformée aux nouveaux arrivants qui débarquent majoritairement à Montréal. Montréal a été la ville industrielle du Québec, et dans les usines, les ouvriers francophones devaient pendant longtemps utiliser la langue de leur patron: l’anglais! C’est pour cela qu’il faut connaître l’histoire du Québec pour mieux le comprendre. Elle est particulière. C’est pas pour rien qu’il a fallu instaurer toutes les lois de défense de la langue française. Puis c’est à Montréal qu’il y a le plus d’anglophones au Québec, on est toujours influencé par son entourage. Et c’est aussi pour cela, selon moi, que le français est menacé au Québec. A cause de la dénatalité mais aussi par le laxisme par rapport aux erreurs de français. Mais comme je le répète, cela dépend des milieux et des contextes. Puis je dois dire que la situation n’est guère mieux ailleurs. Personnellement, je suis toujours choquée lorsque je vais en France. Oui, il y a des angliscismes au Québec mais en France aussi et cela me décourage. Ce n’est pas les mêmes angliscismes et certainement pas les mêmes enjeux mais le résultat est le même: la langue anglaise gagne du terrain. Lorsque je souligne cela avec mes amis Français, ils sont souvent amusés mais c’est en commencant par un mot ici et là qu’on s’angliscise. Lorsque j’écoute la radio FM ou la TV en France, le langage des ados, de certains intellos français, de gens d’affaires, je suis parfois vraiment énervée. Le pire c’est les gens de l’internet ou des nouvelles technologies, ils veulent tellement être dans le coup, qu’ils font des phrases en français avec des verbes français et des noms anglais. Nous on connait au Québec la suite de l’histoire, cela commence par des mots parsemés ici et là, puis c’est des tournures de phrases…et vlan vous être colonisé par l’anglais! Et les Français trouvent cela tout à fait normal, même synomyme d’être branché et parfois même d’efficacité d’utiliser: parking, shopping, pressing, week-end…Pourtant ils existent: stationnement, magasinage (en tout cas au Québec), nettoyeur et fin de semaine (très courant au Québec). Ces mots sont dépassés?? Vous avez compris, est-ce TOP COOL? Non mais j’ai éclaté de rire, la première fois que j’ai entendu cette expression en France. C’est tellement mieux de parler anglais n’est-ce pas? On semble tellement plus « In » et branché! Alors allons y, parlons tous l’anglais désormais…et bien, sans accent! C’est comme si le pays français par excellence de la planète avait démissionné. C’est déprimant.
Alors enfin, laxistes du Québec et branchés de France: réveillez-vous!
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Sujet: Encore le français…
De: Laurence
11 Novembre 1999
Cher Seb, oui y’a une grosse carence à l’école pour enseigner le français au Québec. Je le déplore tous les jours. Mais ta réaction face à « l’intégrisme québécois » est tout à fait typique des nouveaux arrivants. J’ai jamais connu un Français débarquant qui pouvait comprendre. C’est LA question le plus épineuse: ça et l’autodétermination politique du Québec. En France, on baigne dans la langue française, on se sent vraiment pas menacé, je peux le comprendre. Je n’ai pas voulu dire que les Français étaient aussi menacés que les Québécois. Oh Non! Mais je ne crois pas que les Français sont intouchables et protégés par leur ignorance de la langue anglaise. Les québécois ne sont parfaitement bilingues, c’est un mythe, et ils ne savent pas toujours le sens des termes anglais qu’ils utilisent. Comme en France, les gens utilisent des mots qu’ils répètent sans trop comprendre et surtout hors du contexte. Les choses ont commencé de cette même manière au Québec. Les gens utilisaient un mot anglais par imitation, puis par habitude et au bout du compte on ne connait même plus les termes d’origine en français. En France, c’est plus que les parking-shopping-pressing qui choquent, dès qu’il y a un nouveau concept ou une invention, on utilise par défaut le terme anglais. Lorsque nous allons en France, notre idéal du français parfait tombe en mille morceaux. Les Québécois ne sont pas fiers d’utiliser des angliscismes alors que pour certains Français, surtout Parisiens, cela fait bien, ils sont même fiers de prononcer quelques sons anglais et vont en utiliser dès la première occasion. Je dois te dire que ce débat EST DES PLUS ÉMOTIFS POUR LES QUÉBÉCOIS et c’est là qu’il y a le choc culturel avec les autres. Notre langue c’est notre différence et une grande partie de notre identié, nous y tenons. Pour un Français, cela va de soit, c’est acquis et ces questionnements sur la francophonie paraissent comme de la pacotille. Mais si vous, les francophones, vous ne comprennez pas nos inquiètudes, comment les autres nouveaux arrivants qui ne parlent pas le français pourront comprendre et apprendre le français avec volonté. Si les Québécois n’avaient pas été aussi combatifs, aujourd’hui ils ne parleraient même plus le français.
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