En ce début de soirée de 14 juillet, je décide de profiter de l’éclaircie qui illumine le ciel de Chibougamau après une journée un peu grise pour amener mon précieux vélo en balade et lui faire découvrir la région. Juste un petit tour, histoire de me mettre en appétit, pensais-je. J’emprunte immédiatement le chemin qui longe le lac derrière chez moi. Les kilomètres défilent à mon compteur. L’animation de la ville n’est déjà plus qu’un vague souvenir lorsque je bifurque sur un petit sentier qui m’emmène au plus profond de la forêt… le décor est magique. Même si mon cœur s’emballe au rythme de mon pédalier, je ne m’en aperçois même pas, tant je suis fasciné par la grâce de la forêt boréale. Un instant, j’imagine ce sol, ces épinettes, ces étendues d’eau transparentes recouverts de neige et déjà, je pense au plaisir que je ressentirai dans quelques mois lorsque l’hiver nordique s’en reviendra.
Tout à coup, un panneau d’indication : « Ne quittez pas le sentier. Danger. »
La pente se raidit et je n’ai plus la possibilité de la gravir qu’à pied. L’endroit est un peu lugubre. Je pousse mon vélo et cesse de respirer pour profiter de tous les sons de la forêt qui ont l’air de trahir le silence un peu sournois qui règne ici. Puis, je commence à haleter, histoire de ne plus les entendre. La tension est montée, je ne peux expliquer pourquoi…
Hier, j’ai rencontré un énorme porc-épic et j’ai dû empêcher mon chien, qui voulait faire connaissance, de s’en approcher. Je me dis que ce serait bien si je pouvais en apercevoir un à nouveau.
Bientôt le sommet… après, on dirait que ça descend un peu… pas pire! Je ne me sens pas à l’aise dans cet endroit.
Un écureuil traverse le chemin telle une fusée, je tente de ne pas le perdre de vue et suis sa trajectoire des yeux quand tout à coup… un peu plus loin, j’aperçois une boule de poils noirs … pas de doute, il s’agit d’un ourson. Il ressemble comme deux gouttes d’eau à Ratapoil, la peluche de mon enfance.
Sans réfléchir, grisé par une euphorie enfantine, je m’approche… puis j’entends des pas dans un buisson juste là où le sentier semble redescendre… je vois une ombre. Immédiatement, je pense à un chasseur et je me mets à toussoter afin qu’il se soucie de ma présence.
À ce moment, le plus gros mammifère de la forêt d’Amérique sort de son buisson… une ourse noire se tient là… devant moi, qui gambade sur le chemin que je m’apprête à emprunter… mon cœur s’arrête. Je frappe le sol pour indiquer ma présence et ne pas la surprendre. Elle ne bronche pas et s’approche paisiblement.
En général, je suis plutôt téméraire, je n’ai pas froid aux yeux, je sais que les animaux sauvages craignent l’homme…
… toutefois, j’ai pris mes jambes à mon cou, j’ai sauté sur mon vélo, j’ai dévalé la pente et j’ai rejoint la route en asphalte par le plus court chemin. Je suis rentré dans ma petite maison et me suis installé devant mon ordinateur pour vous conter mon histoire.
Qu’auriez-vous fait à ma place ?
kroston
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