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Enseigner au Québec par Rayan

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De Rayan

De nombreux immigrants souhaitent exercer le métier d’enseignant au Québec. Soit parce que c’était déjà leur métier dans leur pays d’origine, soit parce qu’ils désirent réorienter leur carrière dans un secteur certes bénéficiant d’un certain nombre d’avantages : fonds de pension, deux mois de vacances en été, assurances collectives, … mais un secteur exigeant tout de même. Plusieurs parviennent à se faire embaucher tandis que d’autres se voient freinés par l’exigence du fameux permis d’enseigner. Petit coup de projecteur – inspiré d’une petite expérience personnelle – sur ce secteur et sur les opportunités réelles ou supposées, en matière d’emplois d’enseignants.

Au Canada, l’éducation est un domaine de compétence provinciale. Heureusement, quand on connait les spécificités culturelles du peuple québécois et le consensus qui règne dans la province quant à la nécessité de développer un secteur d’enseignement public fort, seul garant de la préservation de la langue et de la culture de ce peuple au milieu d’un océan linguistique anglophone. Il n’est donc pas étonnant de constater que près de 90 % des élèves vont dans des établissements publics, le reste fréquentant des écoles privées …quand même subventionnées à 60% par le gouvernement. Au Québec, on dénombre à ce titre près de 2 800 établissements publics d’enseignement répartis entre les paliers préscolaire, primaire et secondaire auxquels il faut ajouter 48 cegeps et 19 universités. D’autre part, plus de 100 000 personnes ont une tâche d’enseignement rien que dans les trois premiers paliers où l’on retrouve 60% des 1,8 millions élèves québécois.

S’agissant des opportunités de travail, et à l’instar des autres secteurs de la fonction publique, l’éducation est en cours de renouvellement d’une partie de son personnel en raison d’importants départs à la retraite dans les prochaines années. Ce renouvellement sera partiel principalement à cause de la baisse des effectifs de la clientèle étudiante dans plusieurs régions, où l’on assiste même à la suppression de certains programmes et à la fermeture de plusieurs écoles. Il convient de dire, néanmoins, que cette baisse des effectifs est parfois compensée par la hausse des inscriptions à la formation aux adultes, très en vogue au Québec. On dit avec raison que le Québec est l’endroit au monde où il n’y a pas d’âge pour faire des études, surtout en ces temps de crise. Aussi des offres de recrutements d’enseignants existent et notamment dans les paliers inférieurs. Seulement, pour ces niveaux, on doit disposer d’un permis d’enseigner et pour l’obtenir, un baccalauréat d’enseignement de 4 ans est généralement requis. Dans la réalité, de nombreuses autorisations « provisoires » ont été délivrées à des candidats qui détiennent un diplôme supérieur dans un domaine en rapport avec la matière à enseigner. En outre, il est stipulé qu’on doit signer un engagement à poursuivre, à temps partiel, cette formation à raison de 6 crédits de cours (deux cours) par année. Petite consolation, lorsqu’on s’inscrit à un baccalauréat d’enseignement, on peut se faire reconnaitre un certain nombre de cours suivis dans la spécialité à enseigner, ce qui réduirait de moitié environ la durée des études.

Il faut savoir que c’est dans un contexte de manque de personnel que plusieurs milliers de « tolérances d’engagement » ont été accordées durant ces dernières années, notamment à Montréal. D’autres mesures sont aussi prises, ici et là, par les commissions scolaires. Comme de recruter un enseignant sans contrat et de le rémunérer à l’heure. Ce peut être une manière de mettre la main à la patte et d’acquérir de l’expérience. Par contre, ni au Collège ni à l’université, on n’a besoin de permis d’enseigner. Il suffit d’avoir un diplôme supérieur (Bac, Maitrise, Doctorat,..) dans la spécialité à enseigner pour pouvoir postuler. J’ai mis du temps avant de comprendre pourquoi on exige une formation pédagogique pour enseigner dans le secondaire et pas dans le collégial. En fait, il m’a fallu enseigner pendant deux mois dans un centre de formation professionnelle pour saisir les différences entre les deux niveaux. La notion de gestion de classe n’a pas la même portée. Dans la formation professionnelle, les élèves – la clientèle comme on dit -, ce sont en partie des jeunes de 16, 17 ans qui ont décroché à leur quatrième ou cinquième année secondaire et qui demeurent mineurs. Ils sont placés dans ces centres par leurs parents – parfois contre leur grès – pour aller chercher un métier. Les nerfs de l’enseignant sont mis à rude épreuve et il est pratiquement impossible de résister si l’on n’a pas une vraie passion pour le métier. Dans les écoles secondaires, c’est pareil selon divers témoignages. L’une des conséquences de ces difficultés, c’est d’ailleurs la hausse de l’absentéisme des enseignants.

À partir du collégial, l’enseignant a devant lui des élèves qui sont sur le point de rentrer dans l’âge adulte, des jeunes qui veulent pousser plus loin leurs études dans une société qui leur permet de gagner leur vie dès l’âge de 14 ans. Leur motivation est plus grande. Cela dit, il y a en général moins de possibilités d’enseigner dans les Cegeps et les universités que dans les paliers inférieurs. Dans les grands centres urbains, il y a en plus une rude concurrence. À Montréal, les postulants sont nombreux et la sélection des CV y est rigoureuse. Il faut avoir un profil en « béton » pour être pigé parmi les candidats convoqués pour entrevue. Par ailleurs, à Montréal, on a dû atteindre le quota réservé aux minorités parmi le personnel. Rien n’obligerait donc un comité de sélection à sélectionner un immigrant surtout s’il n’a pas d’expérience locale. On ne doit donc pas hésiter à regarder et à accepter des offres venant des régions si on tient à travailler comme enseignant. Et des offres en région, il peut y en avoir parfois.

Ma première expérience québécoise dans l’enseignement fût un cours de trois heures par semaine à Saint-Georges, une petite ville située à une centaine de km de Québec. La deuxième – la session suivante – a failli être un contrat à Sept-Îles à quelques 650 km au Nord-est de Québec. Une ville péniblement joignable par voie terrestre et maritime. La voie aérienne revient plus chère qu’un vol Montréal-Paris. Une ville de 25 000 habitants où il serait même difficile de trouver un appartement à louer. Cette expérience, je ne l’ai pas eue parce que j’ai eu aussi la chance d’être retenu par un cegep du Saguenay – à 220 km de Québec -. Je passe sur les détails de cette formidable aventure et découverte du Québec profond mais ces expériences m’ont ouvert la voie à un travail dans la ville où je suis installé, Québec. J’aurais tout aussi pu rester vivre en région si je n’avais pas eu des contraintes personnelles. C’est un ancien collègue et ami qui me disait, qu’après mon passage au Saguenay, je n’aurais pas de souci à trouver un poste partout ailleurs. Je ne sais pas si ça vaut dans la plupart des cas, mais, en effet, après avoir quitté mon poste, je n’ai pas tardé à recevoir des offres de toutes les régions – excepté Montréal – et surtout des Cegeps de la ville de Québec. Mon sentiment est qu’au moment de décider s’il faut recruter un candidat immigrant, un comité de sélection dans un établissement de Montréal ou de Québec appréciera certainement de savoir que cette personne a travaillé en région, qu’on dit encore fermée à l’immigration.

Ceci étant, le Québec est certes le pays où tout est possible mais où rien n’est jamais garanti. Ni pour les citoyens nés ici et encore moins pour les nouveaux arrivants. Il faut savoir saisir les occasions qui peuvent se présenter car elles risquent de ne pas se reproduire avant longtemps. Des enseignants québécois de souche, avec 15 ans d’expérience, ont été mis en disponibilité et ont été priés de chercher du travail dans un établissement d’une autre région. On doit donc accepter la mobilité professionnelle. Après ça, si on se sent l’âme d’un enseignant et qu’on est animé par la volonté de transmettre le savoir et les compétences, c’est qu’on a peut être une chance de devenir enseignant au Québec.

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De Azarielle

J’étais curieuse de voir ce que tu pouvais écrire sur l’enseignement. Je retiens ta conclusion. En effet, même des Québécois de souche avec plusieurs années d’expérience ont perdu leur emploi avec la décroissance scolaire. C’est le cas de plusieurs de mes collègues puisque je suis dans une commission scolaire très touchée par la décroissance. Une amie a même été transférée, sans qu’elle n’ait un seul mot à dire, dans une commission scolaire voisine. Elle perd ses repères (écoles connues, fonctionnement, collègues, etc.) et devra soit déménager, soit faire beaucoup de route pour aller travailler.

Je suis aussi contente que tu aies parlé de gestion de classe. Pour plusieurs immigrants le retour aux études pour pratiquer l’enseignement est dérangeant. Mais il me semble que c’est une nécessité. Dans certaines classes, la gestion de classe prend plus de place dans la période d’enseignement que la transmission de connaissances. Il faut être préparé à ça.

C’est un emploi difficile, exigeant, mais j’adore ce que je fais. Même si quand même, chaque année, il y a des journées où je donnerais ma démission. À chaque mois de juin, je verse quelques larmes parce que je serai séparée de ces petits monstres. Et à chaque été, je me prépare avec excitation à la rentrée scolaire.

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De zaza70

salut azarielle
je remercie beaucoup le chroniqueur pour ce sujet qui me tient tant à coeur .

j’ai aimé ton commentaire et je m’y suis retrouvé à travers .en effet, l’amour du métier d’enseignant est tres important pour mieux mener sa mission ainsi que l’amour ds enfants .je ne sais pas si je pourrais un jour enseigner au Quebec mais c’est le métier que je préfère le plus et qui me passionne

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De jem22

Je suis plutot d’accord qu’il soit inculqué aux aspirants enseignants des valeurs de la culture québécoise au lieu d’envisager de faire table rase de tout ce qu’il aura acquis et des expériences accumulées. Il n’y a pas de culture supérieure, ni de système supérieur mais seulement des systèmes et des cultures différents voire complémentaires.
Voilà pourquoi je ne comprends pas l’obstination des acteurs de l’enseignement à vouloir juger au rabais toutes les expériences antérieures des immigrants. Je suis pour un test d’habilitation devant aboutir à un permis d’enseigner mais. Evidemment etre pour ou contre ne résoud pas tout mais exprimer son désarroi face à un système qui ne rend service ni aux immigrants ni au système lui-meme.

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De Azarielle

Ce n’est pas de juger inférieures les compétences acquises outremer. Ici l’enseignement se fait actuellement par socioconstructivisme. Ce n’est plus la simple transmission des savoirs. On ajoute à ça des enfants qui ont été élevés différemment et ce ne sera pas long que certains enseignants venus d’ailleurs seront essoufflés.

Je sais que dans certains pays, la notion de hiérarchie est très importante. Il y a un respect de l’enseignant et on ne discute pas avec lui. Ici, c’est bien différent. Les élèves et les parents contestent les décisions venant des acteurs scolaires. Il faut donc être préparés à ça.

Peut-être es-tu à l’aise avec le fait d’enseigner par socioconstructivisme, peut-être aussi es-tu très à l’aise pour évaluer des compétences. Seulement je ne crois pas que ce soit le cas pour tous. Bon, maintenant, il y a des rumeurs comme quoi certaines choses devraient changer pour 2010-2011, mais dans le milieu de l’éducation nous sommes habitués aux annonces qui finalement n’aboutissent à rien.

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De Azarielle

Question comme ça Rayan, avais-tu déjà enseigné avant de le faire ici?
Parce que si j’ai bien compris dans ta chronique, tu as eu un choc quand tu as enseigné à nos adolescents.

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De jem22

Voilà pourquoi j’ai parlé de formation au système local et le socioconstructivisme en soi n’est pas une nouveauté pour les enseignants venant d’ailleurs meme s’il est intégré petit à petit dans un système jadis traditionnel où le maitre ou le professeur détenait le savoir et n’avait qu’à l’inculquer aux apprenants.
Des contestations et des questionnements sur le contenu curriculaire dans les écoles, ce np’est pas une nouveauté. Il y a une sorte d’évaluation continue des enseignants par les élèves et les parents, et des élèves par les professeurs et les autres élèves. Je crois que là nous ne sommes pas loin du socioconstructivisme.
Tu sais Azarielle, le tout ne se trouve pas dans le contenu des enseignements mais bien dans la méthodologie et là il suffit, en ce qui me concerne, que des stages d’imprégnation soient bien organisés avec pour objectifs d’insérer vraiment les aspirants.

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De Benito

Salut Rayan,

Alors comme ça tu es allé enseigner dans le Québec profond….. J’espère que tu dis ça uniquement pour Sept-île et non pas pour le Saguenay-Lac-St-Jean ;)
Dans quel Cégep étais-tu ?

En tout cas, belle chronique qui fait le tour de la question !

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De rayan

Depuis quelques temps, j’ai pris un peu de recul par rapport à mes interventions sur le forum. Là, il y a eu la question d’Azarielle puis celle de Benito…

Azarielle, je t’ai répondu par MP mais puisque je suis là, voilà l’essentiel de ce que j’ai dit :

Oui j’ai enseigné en Algérie mais ce n’était pas le principal métier que j’ai exercé durant ma carrière. J’ai enseigné au Lycée (Cégep), au moyen (secondaire) et aussi à l’université où j’ai donné ce qu’on peut appeler ici un cours de service. Mon expérience, Hors Québec, dans l’enseignement est d’environ 2 ans.

J’ajouterai que je me considère parmi les immigrants qui ont décidé de réorienter leur carrière. Pour le moment, ça se passe bien.

Sinon tes commentaires sont pertinents.

Pour Benito :

Je parlais de Saint-Goerges et de Jonquière. Quand je dis le Québec profond, j’inclus le Saguenay-Lac-Saint-Jean, ce bastion du nationalisme québécois. Dans cette région, il n’y a pas beaucoup d’immigrants – 2 000 environ sur une population totale de 274 000 habitants – mais je connais quelques belles histoires sur des immigrants qui se sont installés à Saint-Félicien, au Saguenay…

Cela dit même si elle est touchée de plein fouet par la crise, Saguenay est une ville importante avec plusieurs grandes infrastructures. J’avais écrit une chronique sur cette région :
http://www.immigrer.com/chroniques/Et-pourquoi-pas–le-Saguenay-Lac-Saint-Jean.html

Sinon, j’ai appris la bonne nouvelle. Donc au plaisir de te lire à mon tour.

Enfin merci à tous pour vos interventions.

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