La société d’accueil voudrait d’une intégration maximale des immigrants, qu’ils se fondent volontairement dans la masse, ce qui est tout à fait compréhensible et souhaitable si l’on veut une cohabitation harmonieuse.
Et si ce n’est pas le cas, cela se fera sous l’effet de lois encadrant la vie quotidienne de l’ensemble de la société.
Faut-il alors qu’ils s’adaptent ou qu’ils se renient ?
Deux limites séparées par un très court écart, mais aux implications importantes.
À chacun son voile…
A.M : Elle est ingénieure, vient de Damas et est installée à Montréal depuis près de deux ans.
J’ai eu, durant mes études au Québec, le privilège de côtoyer un moment cette dame.
Forte de ses connaissances et de plus de quinze années d’expérience professionnelle dans son pays en tant que gérante de projets dans le domaine de l’urbanisme, elle a survolé cette formation qui somme toute était techniquement une formalité, mais dans le fond incontournable pour pouvoir accéder efficacement au marché du travail local.
Durant certains travaux communs, il lui arrivait souvent de rester silencieuse et à mes interrogations, ses yeux cernés se remplissaient de larmes et elle éclatait en sanglots. » Hier, le fils d’une de mes amies, restée à Damas, a été enlevé par on ne sait qui. Elle n’a plus de nouvelles de lui depuis. Ce qui se passe là- bas est terrible, j’ai peur pour mes parents, mes amis. Je n’en ai pas dormi de la nuit. Je suis là aujourd’hui, en cours c’est vrai. Je feins d’être bien, mais je suis dévastée. Je voudrais tant être à leur côté pour les soutenir, mais tu sais que ce n’est pas la solution. Eux me disent que je suis sauvée, que je suis au Canada avec mon mari et mes enfants, et que dieu merci, j’ai fais le bon choix. Ils ne voulaient pas que je parte, mais sont très heureux aujourd’hui que je ne sois plus là -bas avec eux « .
Chassez le naturel, il revient au galop.
Ces yeux cernés et rougis, je les ai vu à maintes reprises durant les quelques mois que nous avons passés ensemble.
E.M : Elle est aussi ingénieure, et vient du Caire.
Elle est quasi-quotidiennement à l’écoute de l’évolution de la situation dans son pays.
Les évènements qui secouent l’Egypte l’inquiètent au plus haut point. Elle est certes aujourd’hui résidente permanente au
Québec, mais son passé, sa famille, ses amis, sont restés au pays.
Il serait inhumain de lui demander de tout oublier, tout comme il serait inhumain de lui demander de repartir, raccourci que trouveraient certains radicaux à la réflexion courte, la voyant très souvent concentrée sur ce qui s’y passe.
Il serait tout à fait juste de lui demander de s’intégrer, et elle le réussi très bien malgré les embûches.
Mais il serait aussi assez juste d’essayer de comprendre ce qu’elle vit.
Ces personnes sont aujourd’hui toutes deux en emploi.
Elles ont relevé le défi, ont passé , contre vents et marées, tous leurs examens et les entrevues d’embauche qui s’en sont suivies, et je parierais fort que leurs interlocuteurs et examinateurs ignoraient leur profonde détresse, éclipsée par leur remarquable courage.
Elles contribuent aujourd’hui à faire, en y apportant leur pierre, les beaux jours des entreprises Québécoises dans lesquelles elles évoluent.
Elles ont surmonté l’impossible pour s’intégrer.
J’oubliais…
Ces personnes portent toutes deux le voile.
L’intégration ne se limite pas qu’aux signes extérieurs…
On peut le comprendre ou non.
À chacun son voile…
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