De Chachawa
Cinq premiers mois de Québec quand on est français, c’est cinq mois intenses !
Ce sont des habitudes qui commencent déjà à s’installer : boire son café bien léger dans d’immenses mugs thermos, dire « Allo » à la caissière, manger du fromage qui fait scrouik scrouik sous la dent, compter le montant de ses courses et rajouter mentalement les taxes pour prévoir le passage en caisse.
Ce sont des inquiétudes sur la météo à n’en plus finir : regarder la météo trois fois par jour, dire « mais euh, je veux dire, les piquets au bord de la route là, c’est parce que la neige elle monte JUSQUE-LA ????? »
Ce sont des découvertes amusantes : les enfants déguisés pour Halloween, le vocabulaire québécois, les bus jaunes d’écoliers.
C’est s’émerveiller : devant un orignal qui traverse une rivière, devant les devantures décorées des magasins en période d’Halloween ou de Noël, devant les rapports à la hiérarchie au travail et l’emploi du temps à l’université, devant les petites maisons sans clôtures, devant le Saint Laurent qui gèle.
C’est s’étonner : « la levure chimique, elle s’appelle vraiment poudre à pâte ? », « et les volets, c’est normal qu’il n’y en ait pas ? », en regardant les gens qui se lèvent spontanément dans le bus pour laisser la place à une vieille dame.
C’est avoir honte parfois : quand la vendeuse demande quelle pointure on veut, et qu’on lui répond « Euh… 39 ? »
C’est sursauter : au passage d’une ambulance, au klaxon d’une voiture que l’on verrouille, face aux gens qui engagent la conversation à l’arrêt de bus.
C’est s’inquiéter : de savoir si les bottes que l’on achète suffiront pour passer l’hiver, de l’heure à laquelle la nuit tombe, du nombre de calories dans un bagel avec fromage ou dans le sirop d’érable.
Cinq mois de Québec, c’est aussi reconsidérer les amitiés, c’est parfois passer Noël loin des siens, c’est se rendre compte que loin des yeux est parfois loin du cœur, mais que parfois c’est aussi près du cœur. C’est chercher en vain les éponges à l’épicerie, c’est boire du « cola diète », c’est se baffrer de muffins.
C’est avoir le sentiment, enfin, de cette liberté infinie que seul procure le fait de pouvoir dire « j’ai osé, je l’ai fait ». C’est la fierté d’avoir su tout quitter pour reconstruire, de parvenir à mêler la culture que l’on porte en soi et celle que l’on découvre. C’est se sentir un peu entre ces deux côtés de l’Atlantique, c’est s’enrichir de chacun. C’est avoir fait un choix.
C’est une belle aventure.
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