Doutes et remises en question
On dirait que c’est le mois des réflexions …. je ne vais pas y faire exception parce que de gros doutes ÉNORMES assombrissent ma petite vie tranquille ! Je ne voulais même pas écrire de chronique cette semaine pour ne pas risquer soit de m’emporter soit de vous ennuyer avec un texte sans intérêt.
Le gros doute et la remise en question, c’est par rapport à mes rapports avec vous, chers futurs immigrants. Je suis en train d’essuyer une grosse claque énorme parce que je n’ai pas su me comporter avec une circonspection qui aurait été de mise dans une situation particulière, et j’ai comme d’habitude dit ce que je pensais croyant toutefois le dire avec un minimum de politesse.
En grandes lignes, j’ai accueilli une famille d’immigrants à leur arrivée ici pendant presque quatre semaines. Par la suite, une fois qu’ils avaient déménagé dans une plus grande ville du Québec, lors d’une absence de presque deux semaines du chef de la famille, la maman m’a demandé que faire pendant ce temps, et je lui ai conseillé d’aller dans les jardins publiques avec les enfants pour rencontrer d’autres mamans et essayer de trouver un moyen de garde pour qu’elle puisse enfin commencer ses recherches d’emploi, se tisser un réseau quoi. Au retour du père, je me suis faite insulter avec le reproche d’avoir poussé cette maman à la débauche. Je ne savais pas que dans les familles de certaines autres cultures, les femmes devaient rester dans leur appartement et surtout ne rencontrer personne même si ces familles ont décidé de vivre dans notre pays si libéral pour les femmes et les enfants. Je ne me suis pas renseignée auparavant sur ce point, et j’ai fait une grosse erreur que je regrette très fort et surtout, je n’ai aucune idée comment y remédier. J’ai répondu sans réfléchir, et c’est typique pour moi. C’est un domaine dans lequel je semble être incapable d’apprendre les leçons que la vie me donne heureusement très rarement mais quand même. Je me suis permise aussi dans un moment d’exaspération de dire presque tout ce que je pensais, et je n’aurais pas dû parce que je suis allée jusqu’à exprimer un jugement (négatif bien sûr), et c’est en effet impardonnable et tellement pas moi ou ce que je pense être. Je ne peux pas écraser une mouche ou une araignée, alors faire du mal à des humains, no way !
En fait, je sais bien que la vérité n’est pas toujours bonne à entendre, mais la vie au Québec m’avait jusque-là confortée dans ma personnalité voire renforcée, et j’ai finalement réussi à oublier les façons d’agir que j’ai pu connaître (subir ….) en France où l’on tourne toujours autour du pot et dit rarement carrément le fond de notre pensée, avis. Je n’ai pas réalisé à qui j’avais affaire, et sur invitation, j’ai donné mon avis. Aujourd’hui je me fais écarteler pour cela. Et même si vous êtes nombreux à me donner raison, ce dont je ne doute même pas d’ailleurs, cet échec individuel, juste un, me fait douter très fort : est-ce que je peux poursuivre avec vous autres en tant que Monika, ou est-ce que je dois me comporter en Européenne maudite mais plus dans le style de ce que nombre d’entre vous êtes habitués ou est-ce que je dois rester moi et ne plus « me mêler » de vos vies ? Je me sentais si bien avec vous, comme tant d’autres disent, on est effectivement une famille, et pas une petite ! Aujourd’hui, je ne me sens plus bien. Pas à cause de vous, oh non, mais parce que je ne suis plus si sûre d’agir dans le bon sens.
Comme disait mon mari hier soir : « La ligne entre donner son avis et se mêler des affaires des autres, eh bien elle est parfois tellement fine qu’on peut ne pas la voir. » Surtout moi. Parce que j’ai tendance à foncer tête baissée. Jamais de la vie je ne veux blesser et faire du mal intentionnellement, mais ce qui compte c’est comment je suis perçue, moi ou ce que j’exprime.
Peut-être que c’est là qu’il faut chercher la lacune de langue puisque la langue française n’est effectivement pas ma langue maternelle – je peux avoir utilisé des mots en leur donnant un sens et en face, un autre sens est donné à ces mêmes mots.
Je suis probablement naïve à un certain degré pour prendre à la lettre ce que les autres me disent, pour répondre avec ma droiture toute personnelle à leurs questions parfois pièges mais que je ne détecte pas parce que je n’ai pas l’esprit assez tordu …. dans ce sens-là du moins J
Ici au Québec, je vis la même chose qu’au Colorado : les gens ne tournent pas autour du pot. Il ne faut pas lire entre les lignes. C’est cette droiture qui nous avait séduite au Colorado, peut-être parce que c’est dans nos cultures, à mon mari et moi qui venons de Belgique du Nord et d’Allemagne de l’Ouest. Ici je peux être moi avec les gens d’ici, et quand je me promène dans mon village, des petits « Bonjour Monika » « Allô Monika » etc. fusent de partout, et je devrais être rassurée. Mais je ne le suis pas. Peut-être que c’est une illusion et tous ces gens tout simplement n’osent pas me dire la vérité. Non non, ne vous fatiguez pas, je sais que je dis des bêtises et que ce n’est pas vrai et que les gens m’aiment bien dans mon entourage. Je ne joue pas au jeu que mon Père aime tant depuis toujours : « Ah, quand on a mon âge …. » et il veut entendre en retour que non, il fait tellement jeune !
Mais je m’interroge par contre sur VOS expériences dans le domaine des relations avec de nouveaux immigrants lorsque VOUS êtes ici depuis quelque temps et d’une certaine façon intégré : avez-vous changé ? Sentez-vous cette différence de façon d’aborder des choses entre par exemple des Français et vous ?
Moi, je sais que j’ai changé. Le Québec m’a changée, c’est évident. Il a achevé ce que mon pays de naissance et le Colorado ont commencé mais que la France avait modifiée pendant les presque 20 ans que j’y ai vécu. Oui, je suis convaincue que l’immigration nous change, mais reste à voir si elle nous révèle ou si elle nous transforme. Peut-être que cela dépend du pays et des gens que nous croisons ?
Si je veux aller un peu plus loin dans mon analyse : l’Allemagne nous apprend à ne pas tourner autour du pot, mais on ne valorise pas ce que font ou disent les enfants et les adultes non plus d’ailleurs. En France, on se tait et on bosse jusqu’à tomber de fatigue physique et psychologique. Au Colorado, on ne tourne pas autour du pot non plus et on a le droit d’être une personne à part entière. Au Québec, on EST quelqu’un et certainement que les femmes et les enfants sont traités avec une attention particulière à tel point que les femmes et les hommes sont arrivés à un point d’égalité de droits au quotidien qui me semble extraordinaire. Ici, femmes et hommes sont tout simplement d’abord des êtres humains et ensuite homme ou femme. Les enfants sont des petites personnes avec leur propre personnalité et on en tient compte jusque dans les garderies et écoles pour leur donner toutes les chances de réussir à trouver le bonheur dans leur vie. Ici, la FAMILLE existe comme une réalité au quotidien, la cellule familiale jouit d’un respect formidable même de la part des employeurs. Le respect et la tolérance qui règnent ici m’ont sauté aux yeux très vite. Mais la tolérance n’équivaut pas de ne pas s’exprimer parce que dans la tolérance il y a aussi l’acceptation d’un avis différent.
Alors voilà …. je me sens déjà un peu mieux. Je me soigne par ma propre chronique ! Après tout il fait un superbe soleil aujourd’hui, les fruitiers sont en fleurs roses et blanches, la verdure est revenue partout, la vie est belle, non ! Ben oui !!!
Et puis non, je ne me laisserai pas abattre par un échec, na !
Je vous aime, ma famille immigrer.com !
Monika
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