Le début de l’année est généralement une période où on en fait, des résolutions pour l’année qui s’en vient. Je ne sais pas pour vous autres, mais là d’où je viens, on fait des résolutions. D’où est venue cette tare? Probablement d’un président que nous avons eu, là-bas, pendant deux décennies. À chaque 31 décembre à minuit pile, il trouvait le moyen de nous gâcher le réveillon en prononçant un discours radiodiffusé de deux heures sur les résolutions de la nouvelle année. Il y avait généralement un thème pour chaque année (genre « année de l’éducation », « année de l’habitat », etc.). Je croyais que personne ne l’écoutait compte tenu de l’heure et du contexte, mais on peut croire qu’il a fini par contaminer toutes les familles. On en faisait donc, des résolutions, individuelles ou familiales, au travail, à l’école, portant sur des sujets très variés – dépendamment de l’âge des concernés – comme « ne plus se chicaner », « tenir sa chambre propre », « arrêter de fumer », etc.
Certaines résolutions sont restées gravées dans mes souvenirs. Comme celle du Nouvel An de mes 15 ans, où je pris la résolution d’apprendre à rouler à vélo. Très pratique quand on doit aller chercher l’eau potable à 3km. Malgré toute l’ingéniosité de mon cousin qui a pris mon apprentissage en main, j’ai abandonné avant le mois de février suivant. Cause de l’abandon: des genoux et des coudes maganés à force de tomber à tous les 20 mètres. À 38 ans, je n’ai toujours pas appris. Ce printemps, je me contenterai une fois encore de courir comme une malade derrière mes enfants qui, eux, ont appris en moins de deux…
Le Nouvel An suivant, je commençais ma troisième année du secondaire, en pension chez des Religieuses. Une première de classe que j’étais, du moins pour ce qui est des résultats scolaires. Bonne dernière dans cette matière étrange que les Sœurs appelaient « conduite ». Il fallait obtenir un 25/40 à chaque trimestre pour rester dans l’école. Or, je naviguais généralement autour de 21-22 sur 40. Cause de ma disgrâce: je ne voulais absolument rien savoir de cette litanie de prières et autres chapelets que les Sœurs nous imposaient matin et soir. Je trouvais mes Harlequins et romans photo beaucoup plus intéressants. Je les glissais même sous ma blouse d’uniforme avant d’aller à la chapelle. Immanquablement, je me faisais pogner deux ou trois fois dans le trimestre par la sœur Surveillante (une preuve qu’elle non plus ne priait pas, sinon comment me voyait-elle?) Laquelle s’empressait de marquer mon carnet de discipline d’un gros -10 à chaque fois. Ainsi, aux délibérations de Noël, la première de classe était en situation de renvoi. Misère! Les profs ne voulaient pas perdre leur meilleur élève pour des histoires de chapelet. Les Sœurs étaient encore plus embêtées : la Supérieure avait été, à l’université, étudiante de mon père. Convocation de ce dernier. Arrangement à l’amiable pour tout le monde: quelques inscriptions effacées du carnet de discipline en échange de la promesse solennelle du paternel de mater la rebelle. La tannante en question promettait donc, au réveillon de ses 16 ans, de ramener un carnet de discipline impeccable à Pâques. Ce qui ne l’empêchera pas de ramener, au grand désespoir de ses géniteurs, un bon 22/40. Pis quoi! Le paternel, lui, ne promettait-il pas à chaque année d’arrêter de fumer? Rendu à 62 ans aujourd’hui, il fume autant que le tuyau d’échappement de ma minoune…
Ainsi donc, le réveillon s’agrémentait de résolutions et de défis que se lançaient les uns et les autres. Il a fallu une guerre pour mettre une pause dans toutes ces simagrées. À un certain moment, c’est bien beau de se donner un défi pour l’année, encore faut-il savoir si on sera vivant le lendemain… Quelques années passèrent, pendant lesquels la résolution était toujous la même chaque jour: tâcher de survivre jusqu’au lendemain. Dix ans et une immigration au Québec plus tard, le frigo était toujours plein, on put dormir les portes ouvertes, on retrouva confiance en l’avenir. On peut-tu encore avoir des résolutions en début d’année? OK. Allons-y pour 2005.
Après quelques mois de vie à Montréal, les petits ont résolu de prendre des cours de natation et d’apprendre à faire du vélo. Ils ont réussi. Maman devait obtenir son diplôme et un emploi. Réussi pour le premier défi, échec retentissant pour le second. Tant pis, elle en sera quitte pour faire des ménages. Papa devait obtenir (ou échanger, c’est selon), son permis de conduire québécois. En 2008, le seul véhicule qu’il est autorisé à conduire icitte, c’est un panier d’épicerie…
Allons-y pour 2006. Maman voulait obtenir un vrai emploi. Ce qui a été fait. Elle voulait aussi quitter Montréal (au grand dam des enfants). Ce qui a été fait aussi. Mais la perte des kilos de trop et des bourrelets disséminés ici et là décrétée avec grand fracas? Rien à faire. Le coupable: le guide alimentaire canadien. Dieu sait pourtant que j’ai essayé. Mais je me perds entre les tasses, les portions et autres mesures ridicules préconisées par ce truc. Pour les aliments comme tels, je peux me retrouver. Certaines choses auxquelles je suis habituée n’y figurent pas, genre mil, ignames, patates douces? Tant pis, un petit effort et je m’y fais. Juste que je dois me rappeler que pomme de terre = patate, haricots = fèves et poivron= piment. Et apprendre à cuisiner de nouvelles affaires que je n’avais jamais vues de ma vie. Comme des brocolis. Je me souviens que la première fois que mon mari a mangé un brocoli cru, il m’a dit qu’il avait l’impression de manger des fourmis noires! Beurk! Mais on se fait vite aux nouveaux goûts. Mais les portions et les tasses? Rien à faire. J’ai toujours fait ma cuisine au pif. Mesures approximatives. Je n’ai jamais eu de balance de cuisine. La dernière fois que j’ai suivi une recette à la lettre, avec les mesures exactes et tout le tralala, c’était dans mon cours de cuisine chez les Sœurs. Ce qui ne m’a d’ailleurs pas empêché de rater complètement mon gâteau, en passant … Bref, ma cuisine au pif, ça a toujours marché. Tant pis pour le guide alimentaire. Il paraît aussi que je dois manger ceci pour éviter cela, éviter ceci pour prévenir cela, ajouter des compléments vitaminés et autres poisons du genre, mesurer ce que je mange dans des portions et des tasses pour augmenter ceci ou diminuer cela. Il paraît aussi que ces fameuses portions et ingrédients diffèrent des hommes aux femmes, des adultes aux enfants. Eeeeeeeeeeeeeeeeeehhhhhh! Pis quoi encore! Qui a le temps ou le goût de rédiger quatre menus pour quatre personnes? Et depuis quand les gens mangent pour se médicamenter? Faque laisse tomber le guide alimentaire, chose. Je m’accommode fort bien de mes bourrelets d’ailleurs, merci!
Quid pour 2007? On a convenu qu’on devait se donner des défis réalisables. Papa et maman devaient se dégoter une maison habitable. Ce fût fait. Fiston et sa sœur devaient essayer de se chicaner un peu moins, de ranger leur chambre et leurs vêtements et de ramener de bons résultats scolaires. Réussi? 0/10 pour la première résolution (ce sont eux-mêmes qui se sont donné cette note, pas moi!). 3/10 pour la deuxième. 9/10 pour la troisième. En lieu et place des résolutions non tenues, ils ont préféré celle de vider les poches de leurs géniteurs et d’épuiser leur patience pourtant réputée infaillible (du moins en ce qui concerne le paternel).
Est-ce que, pour vous autres, les collègues de bureau s’en mêlent? Moi oui. Il paraît que pour 2007, la pause de midi devait être santé: 30 minutes pour manger et jaser un peu, 30 autres pour une activité physique (marche, jeu de balle, gym tonic et j’en passe). Sauf que personne n’a tenu ça. Le lunch aussitôt avalé, tout le monde rejoint son cher ordi vite fait. C’est aussi mon moment préféré pour m’adonner à mon péché mignon: aller faire un tour sur immigrer.com …. Et en 2008? Rebelote. Mon illuminée de collègue a proposé, ce lundi, de faire du yoga le midi. Du yoga SVP! Non mais je rêve! Mais je n’ai rien dit. Je ne veux pas jouer à l’empêcheuse de prendre de bonnes résolutions. Je me suis contentée de lever les yeux au ciel et de remonter dans mon bureau en vitesse. Surtout que la collègue en question ferait mieux de se résoudre à terminer ses rapports à temps, pour une fois dans sa vie….
Et en famille? Rien de grandiose comme résolution. Papa se familiarisera avec les activités de tout nouveau propriétaire comme le tondage de gazon, le ramassage des feuilles, le pelletage des entrées et autres plaisirs du genre. Il paraît que maman n’y touchera jamais, à ces « activités de gars »: deux hommes à la maison, ça devrait suffire. C’est ce qu’ils disent, sauf que ça reste à voir! En échange de ne pas faire le ménage. Ce qui n’est pas une grosse perte, au fond, vu comment ils le font. Le ménage sur deux étages, ce sera pour les deux filles de la maison. Hum! En admettant que la deuxième y touche. Il suffit de voir l’état de sa chambre actuelle pour en douter… Mes kilos de trop, je m’en occuperai une autre année. En 2028 peut-être? Mes enfants auront grandi et j’aurais du temps pour moi, rien que pour moi et mes portions et tasses de brocolis du guide alimentaire canadien. Pour l’instant, je ne fume pas, je ne bois pas. Rien à faire là. Il paraît que les radars photos débarquent. Quand ils seront installés, je conduirai un peu moins vite mais pour l’instant, les malades avec qui je partage les routes ne me donnent pas le goût de conduire mieux. Quoi d’autres, pour mes résolutions de 2008? Ah, oui! J’oubliais! Ne plus mettre les pieds dans ce magasin où la même stupide caissière appelle la sécurité dès qu’une personne de race Noire entre. Pas sûre que je me retiendrais de lui crisser une volée, à cette folle, donc je reste loin! Et vous, que comptez-vous faire de votre 2008?
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