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Audiovisuel au Québec, un article de L'Express

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De immigrer.com

Au Québec, nuages sur l’audiovisuel

Par Nathalie Schneider, publié le 

26/01/2015    

S’il est de plus en plus difficile de faire sa place dans le milieu du cinéma et de la télé, ce n’est pas impossible. A condition de respecter certaines règles, dont la première: se donner du temps pour se créer un réseau de professionnels. 

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En dépit des conditions de tournage difficiles, la production continue…

 

 

© Mike Theiss/National Geograph/Corbis

 

C’est une « success story » comme on en rêve. Quand le jeune Français Daniel Bertolino débarque à Montréal, en 1967 il découvreun Québec en pleine transition. C’est l’année de l’Exposition universelle, un tournant dans son histoire. L’année de l’ouverture sur le monde et de l’affirmation de sa culture distincte à l’échelle internationale. Ça tombe bien, Daniel vient de faire le tour de la planète avec 100 dollars en poche et un contrat signé avec l’ORTF pour aller filmer en solo les peuplades reculées d’Afrique ou les prisonniers politiques à Cuba. 

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Radio-Canada lui confie une émission hebdomadaire, Jeunesse sans frontières, qui connaît un succès foudroyant. Il crée quelque temps plus tard les Productions indépendantes Via le Monde avec son ami français François Floquet, un label toujours actif. « On n’était pas loin de 1968 et de l’effervescence des idées nouvelles; comme aujourd’hui, les jeunes ne se reconnaissaient pas dans cette société figée et étaient prêts à découvrir autre chose », explique le réalisateur, qui n’a plus quitté la Belle Province depuis cette époque. 

En 2013, il s’est vu décerner le très prestigieux Prix Guy Moffette pour couronner ses quarante-cinq ans de carrière dans la réalisation et la production télé. Mais Daniel Bertolino le reconnaît lui-même: sa réussite au Québec est avant tout l’histoire d’un bon timing. Aujourd’hui, les choses ne sont plus aussi faciles.À l’instar du marché planétaire, le monde de l’audiovisuel est en pleine traversée du désert: licenciements massifs dans les réseaux télé et radio, pénurie de productions internes au profit d’acquisition de productions indépendantes, transition vers le Web. 

« Il y a vingt ans, Radio-Canada produisait vingt émissions par an. Aujourd’hui, c’est tout juste deux », constate Daniel Bertolino.Avec une population de 8 millions d’habitants (dont plus d’un million d’anglophones), le Québec ne peut guère compter sur un gros marché d’auditeurs ni de diffuseurs. Alors, pour se démarquer dans ce milieu hautement concurrentiel, une chose importe: « Déborder d’énergie et de créativité », résume le réalisateur. 

Multiplier les casquettes

Il faut aussi s’intégrer à la réalité locale du métier au Québec et accepter de jouer les hommes (ou les femmes) orchestre en multipliant les casquettes: caméra, réalisation et montage, par exemple. « J’étais habitué aux équipes de cinq professionnels à FR3 et, en arrivant à Montréal, j’ai découvert le principe de l’effectif réduit et de la polyvalence, à l’américaine », explique le producteur Jean Fugazza, qui débarque de Paris en 1988, alors jeune cameraman. 

Petit à petit, il comprend que l’audace, le travail et la confiance en soi peuvent lui faire gravir les échelons vers la réalisation et même la production ­ une chose presque impensable en France, où le métier de réalisateur jouit d’un prestige tel qu’il peut être difficile d’y prétendre quand on est « seulement » cameraman. En effet, au Québec comme dans toute l’Amérique du Nord, un réalisateur est un technicien tandis qu’en France, c’est un auteur… Grâce à ses origines, il se voit pourtant confier des projets de coproduction avec des sociétés françaises, notamment l’enregistrement de spectacles pour le festival Juste pour rire. 

« Mon biculturalisme a été un atout majeur pour savoir comment aborder un plateau de professionnels français au Québec, dit-il, notamment en ce qui a trait aux rapports hiérarchiques plus formels. Ma capacité à être Français avec les Français et Québécois avec les Québécois s’avère en effet un gage de réussite en coproduction. » Même son de cloche pour Marie Vedrenne, journaliste de presse écrite à Paris, qui a intégré il y a quelques années le milieu du documentaire québécois grâce à son expérience de reporter à l’international. 

« C’est un autre atout des Français, confirme-t-elle, la culture générale d’une part et la connaissance de l’international d’autre part peuvent faire la différence. Mais attention, derrière la caméra seulement, car devant, l’accent français ne passe pas trop… Enfin, quand on a la double nationalité, il est plus facile de se faire engager en coproduction et de se faire rémunérer en partie par la boîte française, ce qui permet de répartir les charges. Un avantage à ne pas négliger… » 

Réseautage et portfolio

Pour se démarquer, les professionnels français doivent s’armer de patience. Le réalisateur Frédéric Duuez en a fait les frais. Après avoir occupé le poste de directeur de production pendant dix ans à Paris, il débarque au Québec à 35 ans, avec un PVT. À peine arrivé, il décroche un petit contrat en coproduction. Mais il souffre d’un manque de contacts et d’une surqualification qui le mène à l’impasse. Car, au Québec, on décroche rarement un emploi enenvoyant un CV. Le réseautage (à différencier du « piston » pur et simple) s’avère bien plus efficace et le portfolio, la meilleure des vitrines. 

« Avec un PVT, les employeurs hésitent à te donner du boulot; ils ne sont pas sûrs que tu vas rester et ne veulent pas investir en toi », déplore Frédéric. Un an pour se faire un réseau et s’intégrer à une nouvelle culture, c’est peu. D’autant que les immigrants français sont de plus en plus nombreux à postuler dans ce milieu. « Sur 120 CV reçus, 70 proviennent de Français », lui avoue un producteur lors d’une entrevue. 

Dans ce marché saturé, Frédéric réalise que les opportunités sont plus intéressantes en post-production (montage, animation, 3D, par exemple), mais il n’est pas qualifié pour ça. Et le professionnel expérimenté qu’il est encaisse mal l’idée de postuler pour un emploi de « recherchiste » (documentaliste). Faute de temps, Frédéric est donc rentré à Paris où il a repris sa carrière avec, dit-il, un petit pincement au coeur de n’avoir pu vivre l’expérience jusqu’au bout. 

Ce métier est une course contre le temps », confirme Bozhidar Albani (alias « Boji »), un assistant réalisateur qui travaille autant pour la télé que pour le cinéma. Syrien d’origine bulgare, cet architecte de formation a étudié le cinéma à Paris pendant quatre ans. « J’ai vite réalisé que j’aurais plus de chances de percer au Québec, mais ce que j’ai acquis en France m’a apporté beaucoup pour ma transition vers l’Amérique du Nord », dit ce francophile convaincu. 

En attendant de vivre pleinement de son métier, Boji multiplie les petits boulots et finit par cumuler assez d’heures travaillées en réalisation pour intégrer le répertoire de l’Aqtis (Alliance québécoise des techniciens de l’image et du son), l’organisme qui recense tous les projets en développement en télé et au cinéma. « Au Québec, on peut facilement contacter le 1er assistant réalisateur d’un projet pour soumettre sa candidature; en France, ça marche beaucoup plus par copinage. » Pour tenir ces trois dernières années, Boji a pu compter aussi sur une procédure allégée lui donnant droit à des indemnités de chômage. 

 

source et suite : http://www.lexpress.fr/emploi/gestion-carriere/au-quebec-nuages-sur-l-audiovisuel_1634282.html#

En savoir plus sur http://www.lexpress.fr/emploi/gestion-carriere/au-quebec-nuages-sur-l-audiovisuel_1634282.html#YRw0x0XOxo8R3Z0g.99

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