Votre curiosité vous fera lire ceci !
Ecrit par: Ohyeah 6-09 à 12:10
Il en aura fallu du temps, de la patience, du désespoir et de nouveau de l’espoir pour arriver aux portes du Québec. Du Québec plein les yeux depuis l’âge de dix sept ans jusqu’arrivé à mon âge que je qualifierais du double. A aucun moment je n’ai oublié mon rêve. A aucune période de ma vie, ma volonté de m’envoler vers un monde autre ne m’a quitté. Bien sur au plus bas de la vague de la vie, c’est vers ces terres que je regardais et même quand j’étais au plus haut de cette vague je continuais à regarder au loin l’ultime lieu ou je voudrais poser pied.
La décision de partir était ancrée au plus profond de moi-même. La première tentative a été infructueuse en raison de mon profil professionnel. A l’époque j’étais dentiste, oui je dis bien « j’étais », vous comprendrez un peu plus loin. J’avais 28 ans, noyé dans les affres du rejet de dossier ou du rejet tout simplement. Pourtant la flamme était là, réduite à sa plus simple expression : une étincelle. Mais Prométhée n’avait-il pas volé quelques étincelles qui allaient faire venir à la lumière toute l’humanité ? Alors, cette étincelle qui subsistait me suffisait pour y croire encore et encore.
Revenu à des réalités plus prosaïque : la vie quotidienne, je me concentrais sur mon travail sans pour autant en oublier mon rêve. Je continuais à chercher les opportunités, les ouvertures et tout ce qui aurait pu faciliter mon départ. Il est vrai que parfois j’étais fébrile, parfois plus posé et plus patient… mais mon objectif étais le même : Aller au Québec, parce que c’est là bas que je sais y être bien. Souvent on m’a traité de têtu. Mais me traiter de têtu est pour moi un éloge !
Qu’à cela ne tienne ! J’irais en touriste pour toucher, palper, sentir et surtout voir le soleil briller autrement et se coucher avec d’autres couleurs. Je voulais voir le soleil d’hiver et les gens du Nord. Janvier 2001 c’est le départ. Ma décision était de connaître l’hiver à son summum et le voir partir pour céder la place à un printemps vert et explosif de vie. L’hiver j’ai adoré, mais quand on aime, jamais l’aimé ne te trahira ! Le Québec et moi c’était l’apothéose amoureux. Quatre mois et 24 jours ! Les meilleurs moments de ma vie. C’était une vie simple, vraie sans aucun faux problème.
Alors de retour au pays, deuxième tentative de départ, plus construite, plus étayée avec des objectifs précis. Un des objectifs et non des moindres, étant conscient qu’une installation sur la base de mon métier qu’est la médecine dentaire serait suicidaire à moins de disposer de moyens faramineux. Donc changement de carrière, de métiers et de formation. Alors c’est en entreprise que j’irais et plus précisément dans la Gestion de Projet. Tant qu’on y est, faisons les choses bien. Alors ce sera cours du soir, accepter de ne pas voir son petit bout de choux s’endormir, rentrer à minuit, se réveiller à six heures, serrer les dents, ne pas crier et recommencer le lendemain jusqu’à arriver… et au passage, histoire d’arrondir les fin de mois, j’ai été aussi chroniqueur journaliste dans un magazine hebdomadaire, histoire de m’énerver au travers de l’écriture contre ce qui ne va pas.
Une bonne partie de mon chemin de croix est maintenant faite puisque le processus (administratif n’est ce pas !!) d’immigration est maintenant terminé alors restera la vraie immigration celle de s’installer au Québec et y vivre en harmonie familiale et sociale.
Et vous, vous du site, du forum, je vous connais à un un pour vous avoir observé avec une curiosité intense. Avec une saine envie, je voyais les nouveaux arrivants embrasser une vie nouvelle emplie d’une subtile naïveté nécessaire à toute réussite et de doutes tenaces qui feraient faiblir les plus endurcis. Mais leurs rêves, leurs espoirs sont là à les requinquer et les enflammer de plus de volonté de réussir. J’ai vu vos sourires, peines et inquiétudes. J’ai vu des envolées dramatico-amoureuses où l’amoureux transi a traversé les mers pour retrouver sa dulcinée sequestrée (le concerné se reconnaîtra)
Toi Laurence, de ton livre je retiens une leçon et une, qui est d’une honnêteté extrême, à l’image de la plupart des québécois : « PERSONNE NE VOUS ATTEND », tu le dis deux fois et merci de l’avoir dit. C’est vrai, c’est sincère et loyal. Cette phrase a elle seule, si on la comprend bien, si on saisi son sens elle peut devenir un leitmotiv pour outrepasser tout découragement ou fléchissement. Cette phrase dit : « Venez, bienvenue à bord mais vous êtes à la même enseigne, à chance égale, comme tout les autres »
Toi Kabi : A toi tout seul tu es un roman
Toi Monikebek Chaque jour tu donnes une leçon de bien être, j’en reste impressionné. Tu veux le monde, qu’il soit à toi, alors tu en repousses toujours un peu plus les frontières.
Et vous autres, Laurent, Jayjay, Frenchpeg, Impatience, Petitprince… vous avez cette étincelle qui ne s’éteindra jamais !!!
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Quelle aventure!
Écrit par Ohyeah le 8-09 à 5:46
En une nuit toute ma vie je l’ai refaite. Conscient à l’extrême que j’étais en train de vivre un de ces moments où le destin se fait. Quand demain, au soir de ma vie je me retournerais, c’est cette nuit et la journée qui s’en est suivie que je verrais.
Hier, mardi sept septembre, j’ai été au consulat du Canada à Rabat retirer les visas. Donnez moi la main et imaginez avec moi que c’était une journée filmée par un réalisateur du courant surréaliste et avec à l’affiche l’acteur principal qui en véhiculait toute l’émotion c’était moi. Un acteur principal pris dans un tourbillon de sensations toutes à l’opposées les unes des autres.
Dans le train navette qui m’emmenait vers Rabat je voyais tout et rien. La mer à ma gauche cristalline me regardait. Oui ! la mer avait des yeux et voyait un homme aller vers son destin récupérer la clé de ses rêves. La dame à mes côtés, toute occupée à manger ses biscuits aux raisins secs ne savait pas que j’étais le héros de mon propre film. Ah !!! si elle savait !
Au haut-parleur, le préposé s’égosille à annoncer la première station de Rabat : « Mesdames et messieurs les voyageurs nous arrivons à la gare de Rabat-Agdal, nous vous prions de ne pas oublier vos effets personnels, Merci » Mais moi ce que j’entendais dans ce haut-parleur c’était « Hey Monsieur, je sais que vous allez au consulat pour votre visa, emmenez-moi avec vous !! » Je souris et m’engouffre dans le tunnel qui mène de l’autre du quai.
Un taxi, il me faut un Taxi. Les taxis de Rabat sont bleus, Dans ce bleu je vois l’oiseau en métal qui me fera traverser l’océan pour aller au Québec.
Il est 12h45, Au consulat, je suis en avance de quinze minutes que j’égrène une à une pour atteindre les 13h annoncés sur la lettre de convocation. Je laisse les passeports. Il faut revenir à 15h30. Rendez vous compte, Deux heures trente à remplir. Moi si actif je ne savais plus quoi en faire de ces cent cinquante minutes. Je m’en vais grignoter quelque chose. Ce sera une salade sauce-vinaigrette. Chaque grain de maïs me racontait son histoire, les bouts de tomate me parlaient et la sauce me piquait. C’est comme ça que j’ai pu remplir vingt minutes de mon temps.
Mais, juste après la dernière bouchée le doute m’étreignit. Et si jamais ils se sont trompé. Et si jamais ils changeaient d’avis (« ils » c’est les gens d’Immigration Québec »). Non ce n’est pas possible, ils seraient trop cruels. Je sors du restaurant presque en courant pour noyer ces tourments.
Alors, je jette mon dévolu sur le banc d’un jardin à côté du lycée Descartes. Je regarde les potaches pleins de vie et l’esprit vide de doutes. Les jeunes adolescents et adolescentes se séduisent entre eux et ne font pas attention à l’homme assis sur le banc dont le destin est en train de se faire.
Quinze heure trente, salle d’attente du consulat. Nous sommes plusieurs à attendre. Chacun observe l’autre. La jeune femme là bas debout, pourquoi est-ce qu’elle part ? Fuit-elle quelque chose. Le couple assis dans le coin ont sûrement des enfants et je devine que pour se rassurer, étouffer leur peur, ils se disent « c’est pour les enfants que l’on fait ça ». Des morceaux de vie ensembles et chacune de ces vies voit son destin s’accomplir dans cette salle d’attente.
Je me retrouve dehors. Les passeport à la main, je n’ose pas trop regarder ces documents. A force d’attendre ils sont devenus un mythe et pourtant ils existent. La porte du consulat se referme avec un bruit métallique qui me fait sursauter et ramener à la réalité. Je me dirige à pied vers la gare. J’ai besoin de marcher, trop de tension, trop d’énergie. Pour ne pas crier, je marche vite.
Le train pour Casablanca. Je n’ai rien vu, je n’ai pas senti le trajet je suis dans un état d’absence intellectuelle. Seul mon corps est là. Mon esprit a demandé une pause. Il le mérite bien, cela fait trop longtemps que cela dure. Au haut-parleur, le même préposé du matin s’égosille à annoncer l’arrivée au terminus : « Mesdames et messieurs les voyageurs nous arrivons à la station de Casa-port, terminus, nous vous prions de ne pas oublier vos effets personnels, Merci » Mais moi encore une fois, ce que j’entendais dans ce même haut-parleur c’était « Hey Monsieur, vous êtes allé consulat pour votre visa, et vous ne m’avez pas emmené avec vous !! »
Il faut repasser par le bureau pour rassurer mes patrons et montrer que j’aime quand même mon travail. Huit heures du soir, je rentre chez moi, ma femme m’attend, elle veut que je lui raconte tout, tout, j’acquiesce, je la rassure et esquisse les premières phrases, à bout de forces, je m’endors…
Ohyeah
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