Bonjour,
Ce que tu dis sur les Québecois et la francophonie, c’est exactement ce que je ressens depuis que je suis au Québec. Parmi mes collègues, il y a des allophones. Un d’entre eux est d’origine arménienne. Ses langues maternelles sont l’arménien et le turc. J’ai discuté quelquefois avec lui au sujet de la préservation du français. Pour lui, c’est simple : le français est foutu et il ne voit dans la loi 101 qu’une dérisoire et inutile tentative de survivance. Dans une certaine mesure, je le comprends. Lui, de toute façon, a fait une croix sur sa culture, alors, tant qu’à en choisir une autre, autant que ça rapporte… Mais c’est un peu comme dire à un cancéreux : De toute façon, tôt ou tard… donc, autant aller te jeter tout de suite par la fenêtre. Heureusement que, pendant la seconde guerre mondiale, les résistants européens n’ont pas tenu le même raisonnement.
Plus je vis au Québec, plus je deviens un farouche défenseur de ma langue et de ma culture. C’est le dos au mur qu’on se découvre des forces. L’objectif des politiques est parfaitement atteint, en tous cas en ce qui me concerne.
Le français n’a jamais été autant en danger au Québec que maintenant. A la fin des années 70, il semble qu’il se soit opéré une sorte de « nettoyage ». Les anglophones extrémistes sont partis s’installer dans des provinces plus hospitalières. Avec eux, est partie la rage qu’avaient les francophones de préserver leur langue. Cette rage a été remplacée dans la population par une sorte de consensus mou, où certains canadiens anglophones envoient leurs enfants dans les écoles francophones au prétexte de leur assurer un meilleur avenir. De toute façon, l’économie fait leur jeu en grignotant sournoisement tous les acquis des années 70.
Beaucoup de jeunes Québecois, sont prêts à tout sacrifier sur l’autel du profit. J’en cotoie plusieurs, qui délaissent leur français au profit de l’affinage de leur anglais. Le collègue allophone dont j’ai parlé au début est d’abord anglophone, mais il parle aussi français. Avec lui, je ne parle que le français. Mes jeunes collègues Québecois de souche, eux, lui parlent anglais. C’est à celui qui montrera aux autres qu’il maîtrise le mieux la langue de Shakespeare. Je trouve cette attitude déplorable. Mon ressentiment envers le géant Américain et son mépris du reste du monde augmente de jour en jour. Il arrivera forcément un jour où l’économie et le profit laisseront la place à d’autres valeurs. Car il est une chose certaine, avec le système actuel, on va dans le mur, et on y va vite. Espérons qu’il n’y aura pas trop longtemps à attendre.
J’ai eu l’occasion d’aller plusieurs fois au Nouveau-Brunswick et dans le nord du Maine, dans la famille de ma compagne. Là, dans les décombres francophones fumantes qu’a laissé le lance-flamme culturel américain, j’ai rencontré des gens qui appellent leur grand-mère « mèmère », comme moi lorsque j’étais jeune. J’ai compris alors qu’il était grand temps de prendre le maquis.
Amicalement,
Jean-Claude
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