De TOMCAMP
L’immigration: un jeu inédit
Imaginons que l’Immigration soit un jeu de société où chaque joueur évolue à la faveur d’un dé. Un grand plateau parsemé de couleurs marquerait le passage des différents paliers grâce à diverses cases. A la manière du Trivial Poursuit, des épreuves nous seraient proposées afin d’évaluer nos compétences et nos motivations…Une fois les pions en piste notre partie pourrait enfin commencer. Alors jouons si vous le voulez bien!
Au début, nous sommes tous dans la zone blanche qui symbolise les premières démarches et formalités. Elle correspond à la prise de conscience qui nous pousse à mettre en oeuvre le projet d’immigration. On y retrouve les grandes cogitations sur les raisons du départ et autres arguments. Ainsi du pourquoi au comment tout est passé au crible. Les cases se déclinent sous l’appellation DOSSIER, ENTRETIEN ou encore DELEGATION DU QUEBEC! Elles témoignent de notre détermination à vouloir changer de région du monde pour s’épanouir davantage. Ainsi à travers des critères bien définis une poignée d’intervenants se penchent sur notre cas. Le plus souvent, nous remportons la mise et passons la zone blanche sans trop d’encombre. Le Certificat de Sélection est l’objet clé de ce secteur car il clôture le niveau. Seulement, certains pions sont parfois mis en touche et n’ont pas l’occasion de poursuivre l’aventure. Il leur faut donc recommencer la partie ou prendre une autre voie. Nous souhaitons à ces joueurs un meilleur départ et une donne plus généreuse…
Avec la zone verte, le nombre de case augmente. Tout porte à croire que nous n’allons pas valider cette étape aussi facilement que la précédente. Et pour cause, il s’agit du secteur consacré au Fédéral. Vous savez ce « petit » formulaire aux feuillets interminables où l’on nous demande de tout détailler. Notre pion doit alors rivaliser d’ingéniosité pour fouiller dans ses archives à la recherche de justificatif. Il doit se souvenir où il a vécu dix ans en arrière, quels établissements il a fréquenté durant sa scolarité ou par quels organismes il a été employé. Et nous voilà à décrire notre passé afin de justifier notre parcours. Pour certains l’étape n’est qu’une formalité, pour d’autres c’est un vrai casse tête. Mais comme tout le monde est logé à la même enseigne, il vaut mieux y mettre de la bonne volonté. Les cases se déclinent ici sous les noms DERP, VISITE MEDICALE ou AMBASSADE DU CANADA! Dans cette antichambre de l’immigration on ne mesure plus notre engouement pour la belle province mais davantage notre capacité à tenir la distance. Le courage ne suffit plus pour affronter l’épreuve, la patience est de mise. Alors chacun à sa méthode pour résister : certains adoptent la zen attitude pour lutter contre l’angoisse quand d’autres guettent le moindre courrier provenant du facteur. Dans les deux cas, une tension se manifeste dans notre quotidien et insinue le doute. Car au-delà des considérations d’un éventuel refus, on s’interroge sur la nécessité du départ. On se pose alors l’éternelle question de la bonne décision ou du bon choix. Comme si nous pouvions envisager à l’avance ce dont sera fait demain. Non décidément cette interrogation n’a pas lieu d’être quand on est encore dans son pays d’origine. Il faudra attendre d’être installé, d’avoir adopté un nouveau rythme pour en mesurer tous les effets….Cependant l’antichambre de l’immigration est propice aux délibérations, voire même aux hallucinations. Les silences sont interprétés comme des retards rédhibitoires, les courriers ne semblent jamais arrivés. Et puis un jour nous recevons une grosse enveloppe jaune estampillée AMBASSADE DU CANADA. Le verdict tombe et s’avère positif. Ce n’est qu’à ce moment là que l’appréhension s’enfuit et laisse place à l’émotion. Des larmes de soulagement ou de joie viennent alors clôturer la zone verte….
Est-ce la fin de la partie ? Sommes les nous vainqueurs de ce jeu inédit ? La zone bleue est là pour y répondre. Non tout n’est pas terminé, les précédents paliers n’étaient que la partie visible de l’iceberg. Nous avons certes franchi un grand cap mais d’autres épreuves nous attendent. A commencer par la mise en place du DEMENAGEMENT. Ce mot à lui seul est lourd de sens car il concrétise une idée qui était pour le moins abstraite. Le temps est donc venu de songer aux préparatifs du départ. Pour cela, il faut s’organiser : VENTE, BILLETS, CARTONS, PAPIERS, RESILIATION, sont les maîtres mots de cette étape. Ils lancent un compte à rebours qui finira sa course dans un aéroport. Mais avant le Jour J tous ces détails restent à régler. C’est pourquoi notre pion doit faire preuve d’organisation. La stratégie consiste à établir un plan de bataille pour ne rien oublier. Progresser pas à pas et non se précipiter. Notre désir est telle que nous voudrions que tout s’achève par un claquement de doigts. L’excitation se mêle ainsi à la peur de l’inconnu. Le Québec saura-t-il m’enrichir et m’épanouir davantage ? L’éloignement de mes proches ne sera-t-il pas trop dur à supporter ? Encore et toujours les mêmes interrogations…C’est pourquoi l’immigration doit être un choix de vie mûrement réfléchie. Il ne peut s’agir en aucun d’une lubie voire même d’une utopie. Mieux vaut donc partir un brin lucide pour être un peu surpris plutôt que d’être trop confiant et d’être trop déçu. Ainsi la zone bleue est rythmée par le sceau de l’action et des cogitations. Sa solution apparaît au moment du décollage quand on quitte un pays. Le vol est l’occasion de faire le point sur le chemin parcouru et le sentier qui s’en vient. Il nous emporte vers notre nouveau port d’attache dans un « grand bœing bleu de mer »….
Dès notre arrivée, la zone rouge prendra le relais et posera les bases de notre installation. Elle nous cueille à la sortie de l’appareil et nous invite à divers processus : DOUANE, AMENAGEMENT, INTEGRATION. A chaque pion correspond un parcours bien différent de son voisin. Pour l’un ces étapes seront formalités quand l’autre aura du mal à les passer. Mais au bout du compte l’essentiel sera de trouver sa place dans cette société et de s’équilibrer. Se recréer des points de repères, tisser des liens ou trouver un job prendra du temps. Là encore, il faudra s’armer de courage face à l’adversité. Il y aura des hauts et des bas, tout ne sera pas rose. Néanmoins le rouge pourra être passion et non désillusion. Mais cette partie du jeu n’est pas encore jouée ni encore remportée. Seule la durée pourra nous conforter dans notre choix ou infirmer nos jugements….
En espérant que votre partie vous mènera bien loin, bonne chance à tous…
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