Au moins 10 000 immigrants de plus par année doivent être accueillis juste au Québec, afin de faire face à la pénurie de main-d’œuvre qui frappe la province de plein fouet, selon cette nouvelle étude de l’Institut du Québec (IdQ) publiée aujourd’hui.
Voici un extrait du rapport :
Le Québec, comme bien des sociétés occidentales, est confronté à un problème démographique causé par plusieurs facteurs. Avec un taux de fécondité parmi les plus faibles (1,7 enfant par femme), le Québec ne renouvelle pas sa population. Même si la province attire près de 50 000 immigrants par année, son solde migratoire net est plus proche de 30 000 personnes, ce qui est insuffisant pour assurer le renouvellement de population dont le Québec a besoin pour maintenir son bassin de population active. L’allongement de la durée de vie fait aussi en sorte que la société québécoise devient rapidement une société âgée. De ce problème démographique résulte un ralentissement de la croissance du PIB qui va se rapprocher du taux de croissance de 1,6 % en moyenne par année. La productivité québécoise, déjà basse, sera elle aussi éprouvée. Les habitudes de consommation du marché local vont changer et les finances publiques devront répondre à une augmentation significative des besoins en soins de santé. Finalement, la pénurie de travailleurs risque de réduire les investissements et d’ébranler la force économique du Québec. Pour répondre à ce problème, l’Institut du Québec (IdQ) propose six pistes de solutions :
- Augmenter les seuils d’immigration et la capacité d’intégration des nouveaux arrivants;
- Augmenter les mesures de rétention des travailleurs expérimentés;
- Diversifier les marchés d’exportation;
- Favoriser la conciliation travail-famille;
- Miser davantage sur l’automatisation;
- Maintenir le contrôle des dépenses publiques et de la dette.
Renforcer l’immigration
Depuis toujours, le Japon reçoit peu d’immigrants. Pour des raisons culturelles, il accepte très peu de personnes de l’extérieur. De tous les pays développés couverts dans le rapport de l’IdQ sur la mobilité sociale, c’était de loin celui qui avait la plus faible proportion d’immigrants. Cependant, la Finlande et l’Italie ne sont pas si loin derrière. Il faut se rappeler qu’à la différence de pays comme le Canada, les États-Unis ou l’Australie, ces pays n’ont pas une longue tradition d’accueil. Seule l’Allemagne se rapproche un peu du modèle canadien. Le graphique suivant montre les proportions de personnes nées à l’étranger dans les populations des différents pays.
Depuis le tournant du siècle, la Finlande et l’Italie ont pratiquement doublé leur rythme d’accueil des immigrants. L’Allemagne, qui talonnait depuis quelque temps le Canada quant au flux annuel net d’immigrants en nombre absolu, l’a nettement dépassé ces dernières années avec la crise des réfugiés syriens (dont les flux ont été de façon prédominante vers l’Allemagne). Une autre dynamique soutient la performance allemande : la crise européenne qui a encouragé beaucoup d’Européens du Sud (Italie, Grèce, Portugal, Espagne) à y migrer. Le Japon a pris le chemin inverse. Son dépeuplement a déjà commencé dans plusieurs villes japonaises et le gouvernement estime qu’au rythme actuel, la population aura diminué du tiers d’ici 2065. Autrement dit, elle passera de 128 millions d’habitants, sommet atteint en 2008, à 88 millions, malgré une espérance de vie moyenne qui sera alors de 85 ans pour les hommes et de 90 ans pour les femmes. Le Japon a consciemment choisi l’endettement au lieu d’autres solutions pour contrebalancer les effets économiques du vieillissement de sa population.
Recommandation : Augmenter les seuils d’immigration
Comment cette recommandation pourrait-elle être mise en œuvre au Québec? L’augmentation des seuils d’immigration apparaît comme une solution incontournable. Comme le soulignent les auteurs (El-Assal & Fields, 2017), une immigration plus forte compensera la diminution de la population active (en raison du départ des baby-boomers du marché de l’emploi) et réduira la pression sur les finances publiques (notamment au chapitre des dépenses de santé). D’ailleurs, selon les calculs du Conference Board du Canada, entre 2018 et 2022, il faudrait que le Québec accueille 43 000 personnes de plus que prévu pour atteindre un taux de croissance du PIB semblable à celui prévu pour l’ensemble du Canada. De plus, ce chiffre ne tient pas compte des pertes d’immigrants estimées à 25 %. Il faudrait donc augmenter les seuils d’immigration de près de 10 000 personnes supplémentaires par année, dès l’an prochain, pour atteindre un taux de croissance du PIB semblable à celui du Canada. Toutefois, comme l’indique le rapport intitulé L’intégration, un facteur déterminant de la croissance, trois conditions devront être remplies. Premièrement, les immigrants devront mieux être intégrés professionnellement sur le marché du travail. L’expérience et les diplômes obtenus à l’étranger ne sont pas facilement reconnus au Québec. En conséquence, les immigrants récemment arrivés au pays occupent généralement un emploi en dessous de leurs capacités et compétences. Deuxièmement, le Canada et le Québec doivent « renforcer [leur] capacité d’absorption pour permettre aux nouveaux arrivants de s’intégrer efficacement sur les plans économique et social». En d’autres termes, le Canada tout comme le Québec doivent mettre en place les conditions qui permettront aux immigrants de participer activement à l’économie. Troisièmement, il faut encourager les Canadiens à faire confiance à l’immigration. Pour que «l’acceptabilité sociale» se fasse, il faut que les immigrants contribuent significativement à l’économie québécoise. Le récent rapport intitulé 450000 Immigrants Annually? Integration is Imperative to Growth évalue l’impact de plusieurs scénarios d’immigration et leur incidence sur la croissance économique canadienne et les coûts de santé. Les résultats sont résumés dans le tableau tiré de l’étude en question.
Source : Institut du Québec. Pour Le rapport intégral du 22 novembre 2017 (PDF.)
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