De Zylootino
J’ai atterri à Montréal il y a exactement 1 an et comme beaucoup j’ai envie de partager un premier bilan. La plupart des bilans sont matériels, pratiques ou comparatifs (Québec vs. pays d’origine). Pour moi le bilan est plus personnel car cette expérience m’a profondément transformé. Avec l’immigration je me suis offert la liberté de repenser ma vie et il se fait que ça débouche sur de belles opportunités. C’est ce voyage intérieur que je voudrais partager.
La première chose que j’ai ressenti en arrivant, c’est la tranquilité, une sorte de baisse de rythme, l’aiguille descend sur le manomètre, les gens parlent calmement, marchent tranquilement, personne ne crie, peu courrent (à part les Français sur le Plateau:).
La deuxième chose que j’ai ressentie c’est que personne ne t’attend. Ni comme ami, ni comme employé. Mais personne ne te rejette non plus. Aujourd’hui je reformulerai plutôt comme ça: on ne te demande rien, et tu peux faire ce que tu veux. (pas mal, non?)
La troisième chose que j’ai comprise, c’est que mon « beau CV » reposait tellement sur la connaissance d’un milieu et d’un contexte culturel en Europe que je ne pourrai rien en faire ici.
Trois semaines après mon arrivée je me suis donc réinscrit à l’université, dans un domaine pas tout à fait nouveau pour moi mais dans lequel je n’avais jamais étudié. Ca entretient le cerveau (estime de soi), je rencontre des gens (réseautage), je pratique mon Anglais (université anglo), et j’ai des économies alors je stresse pas trop. L’été passe, je cherchotte quand meme du boulot, je pense me frotter à ce que certains appellent la préférence québécoise, j’ai l’impression de me faire avoir comme un touriste dans un souk à chacun de mes achats, bref, ca va pas fort. J’ai d’ailleurs écrit ce postoû ca se ressent pas mal.
Puis les choses se décantent et je commence à comprendre. Début septembre, j’étudie toujours mais cette fois il est vraiment temps de travailler. Je m’assieds devant mon « beau CV » à la recherche de quelques lignes qui évoquent une compétence, un savoir-faire (« qu’est-ce que je sais faire » au lieu de « qu’est-ce que j’ai déjà fait ») et je me rappelle que pendant mon DEA j’ai donné beaucoup de cours mais aussi des formations professionnelles, et j’ai aimé ça. Je cherche « formateur » dans Jobboom, j’envoie trois candidatures et j’ai un job la semaine suivante. Merveilleuse expérience, je rencontre 15 nouvelles personnes par semaine, de tous ages, de tous les milieux, je commence à comprendre comment les québécois fonctionnent et j’aime ça. Et puis moins d’un an après avoir repris les études, j’ai changé de job et je fais exactement ce que je voulais faire en les commençant. Professions à ordres mises à part, les victimes de la préférence québécoises que j’ai rencontrées sont des personnes qui n’ont pas intégré que les québécois ne sont pas des européens.
A côté de ça je prends le rythme local, je perds l’habitude de comparer avec l’Europe, de la confrontation d’idées, de l’argumentation excessive, face aux européens toujours dans cette dynamique je me demande à quoi ça sert, pourquoi gaspiller tant d’énergie pour un résultat forcément négatif:une conviction est le fruit d’une vie entière, on ne la change pas avec quelques bons arguments. Et finalement j’aime l’idée du consensus parce que c’est une manière de respecter les personnes qui ont d’autres opinions en s’abstenant des les juger. C’est parfois plus important que de prendre « la bonne »(en est on bien sur, d’ailleurs?) décision. Et surtout, ca chasse les énergies négatives et ça nous rend plus disponibles pour les choses qui comptent vraiment.
Ce qui l’immigration m’a apporté, c’est l’opportunité de m’interroger sur ce que je voulais faire et qui je voulais être, et le Québec me permet de le réaliser petit à petit. Je vous souhaite à toutes et tous un bon voyage
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