Ville ou campagne, que choisir ?
Je reviens de mon premier déplacement dans le cadre de mon travail ici à Whitehorse, et la destination était tout à fait classique pour les Yukonnais : Vancouver. D’ici on va à Vancouver comme de St-Lambert sur la rive sud à Montréal. Pour moi, c’était pour une journée et demie d’orientation par le bureau régional de mon département et la rencontre annuelle de tout le personnel de Colombie Britannique et Yukon.
Comme mon mari est arrivé pour 2 semaines à Whitehorse, il pouvait prendre soin des garçons pendant mes 3 jours d’absence, et c’est le cœur léger que je me suis envolée lundi en fin d’après-midi pour cette petite escapade …. Je devais retrouver ma collègue à l’aéroport de Vancouver, elle arrivant de Toronto presqu’à la même heure que moi de Whitehorse. Je n’avais pas pris d’avion depuis un an et demi, et je ne me souviens pas à quand remonte mon dernier vol toute seule, sans mon homme à côté de moi. Miracle, ma collègue et moi, nous nous trouvons preque tout de suite, et ensemble, nous voilà dans la file d’attente pour un taxi. Nous voici dans une vraie grande ville. Vancouver by night. Wouah ! J’étais toute excitée de cette sortie de trois jours, j’avais plein de plans, d’envies, de projets…. Beaucoup trop pour seulement 3 jours !
Notre hôtel se trouvait au cœur du centre ville, mais comme il était déjà pas mal tard et que notre journée du lendemain commencerait tôt et serait assez chargée, nous nous sommes simplement installées dans nos chambres sans sortir ce premier soir. J’étais au 4e étage de ce superbe hôtel où paraît-il la Reine d’Angleterre est déjà descendue, et j’avais vue sur…. la rue Georgia. Mais le bruit était supportable, et je m’adonnai à une activité bien lamentable mais que je n’avais pas pu pratiquer depuis 5 mois : regarder la télévision …. Ridicule, hein ! Je me souviens encore de mon étonnement que la ville ne sentait pas les gaz d’échappement …. même pas en descendant de ce minuscule oiseau de fer « Jazz » qui nous avait amenés de la nature à profusion dans la grande ville, à la civilisation quoi….
Le lendemain matin, j’ai marché jusqu’au bureau où je devais suivre mon « orientation professionnelle » – c’était dans la même rue, en fait dans le bâtiment de la bibliothèque de Vancouver, un superbe bâtiment en rond. Je vous paserai les détails de ma journée de boulot sauf que l’assistante de la boss de ma boss est allée manger avec moi dans un restaurant libanais à 10 minutes de marche de là – j’ai ADORE ! Mais pour ma soirée, j’avais un projet important : retrouver mon amie de longue date, celle avec qui j’avais fait ce rêve de Bed & Breakfast, celle pour qui j’avais traversé le Canada une première fois en Greyhound pour aller à son mariage il y a presque deux ans maintenant.
Depuis longtemps elle s’était demandé comment étaient les chambres dans ce genre d’hôtels que le commun des mortels ne peut ou ne veut pas sepayer, et on était toutes fofolles de visiter ma chambre et ensuite un des restaurants de l’hôtel. Pas de mari, pas d’enfant, juste nous deux à jaser et se rappeler tel et tel souvenir. De vraies retrouvailles de filles, et tout ça avec une bonne bouffe en plus ! Pas d’heure à respecter, pas d’avis à demander à qui que ce soit, la liberté dans la grande ville…. où ELLE habite à l’année longue ! Après le souper, on a marché dans les rues alentour – il faisait doux pour moi qui trouvais que 10 degrés Celsius, c’était le printemps avancé tandis que des passants disaient avoir froid avec ce vent ! Vent ? Quel vent ? Où ça ? Et des gouttes de pluie…. qui aurait cru que j’aimerais recevoir des gouttes de pluie ??? Après tant de neige et d’air généralement sec, je n’avais pas réalisé à quel point l’eau dans l’air nous faisait défaut au Yukon ! Mais il ne pleuvait même pas assez pour retourner à l’hôtel chercher le parapluie (il y en a un dans toutes les chambres de cet hôtel…. ça vous dit quelque chose sur la météo là hein !).
Je me sentais bien parce qu’avec mon amie, on était en confiance, et elle connaissant le quartier (elle travaille dans ce coin), elle a guidé nos pas. Jamais je n’ai ressenti la moindre insécurité qu’on pourrait attendre d’une ville aussi grande. Mais je me demandais bien pourquoi ils vendaient des fourrures par ici…. il ne fait jamais assez froid pour justifier cette épaisseur de vêtements ! Je comprenais bien par contre pourquoi celles-ci étaient en soldes : elles ne servent à rien, alors qui voudrait les acheter sinon les Yukonnais peut-être ??? Mais les Yukonnais(es) ne se pareraient JAMAIS de fourrures rose pâle ou bleu ciel ni même gris perle…. Du loup, oui, ou du grizzly, mais dans leurs couleurs naturelles s’il vous plaît. Et quoi que je ne sois pas pour la « vraie » fourrure comme vêtement, au Yukon je peux comprendre et accepter la raison d’être de tels vêtements car le climat justifie bien plus l’utilisation des peaux de bêtes que dans « le sud »…. Au Yukon, la fourrure est encore quelque chose d’utilitaire, un produit accessoire de la chasse indiciuelle et non pas commerciale. Personne ne porte de la fourrure pour se faire voir ici, c’est un outil pas une décoration.
C’est en faisant du lèche-vitrine que la différence m’a sautée aux yeux. Si en Estrie, nous vivions dans un petit village de 4,000 âmes, Whitehorse avec ses 22,000 habitants est bien plus villageois encore ! La multitude de magasins à vendre de tout ce que le cœur peut désirer est absolument éffarente ! Je suis convaincue qu’il n’y a rien qui s’achète qu’on ne puisse trouver à Vancouver, tout comme dans toute autre grande ville comme Montréal, Toronto, Edmonton, et j’en passe (il y en a quand même une belle petite série au Canada….). La seule chose qui empêche de pouvoir acheter telle ou telle chose ici c’est l’argent peut-être. Le choix est immense dans chaque famille de produit. Je vous jure que quand on vient de Whitehorse, on a l’impression de se trouver au paradis commercial ! Je n’ai toujours pas assez de sous pour ne serait-ce que penser à magasiner pour de vrai, mais j’ai bien aimé juste regarder aussi. Parce que vous savez quoi ? Je n’ai plus besoin de tout ce choix. Oh, j’apprécie de savoir que c’est là, j’apprécie de savoir que je vais retourner là au mois de mai prochain et peut-être encore une fois avant la fin de cette année, peut-être même que j’aurai la chance d’aller vers l’est, qui sait ! Mais je suis en paix avec moi-même et du choix qu’on a fait avec Whitehorse qui est tellement loin de tout, mais alors tout ce qui ressemble de près ou de loin à Vancouver, Montréal ou Edmonton.
Le mercredi soir, ma collègue et ma directrice m’ont emmenée voir un film à ? h de marche de l’hôtel (si si, on a marché !). $ 10.50 le ticket. Chez nous, au pire c’est $ 9. Les rues étaient paisibles voire vides. Il faisait bon ce soir-là aussi. Mais Whitehorse commençait à me rappeler au bercail. Pas juste mes fils et mon mari, non, Whitehorse et le peu que je connais du Yukon aussi. J’aimais mon escapade mais je me réjouissais de rentrer chez moi le lendemain. Je n’ai même pas pu aller faire un tour chez Winners ou un autre magasin dans le quartier avant de sauter avec ma collègue dans un taxi qui nous a ramenées à l’aéroport, et je n’ai même pas ressenti de regret. Ma collègue revenait après 3 semaines d’absence et on était toutes les deux contentes de rentrer à la maison tout en ayant fortement apprécié notre petit séjour « dans le sud »….
Je me suis surprise à me conduire en maudite Yukonnaise : je ramenais TOUT ce que je voyais à une comparaison avec le Yukon, Whitehorse, notre nouvelle vie. Je ne critiquais pas, mais je ne savais pas ne pas tirer des parallèles pour prouver que pour moi, mon meilleur choix perso à moi, c’était Whitehorse. Oh ma copine aussi aimerait vivre dans un tel cadre mais pas avec de telles températures…. Je sais qu’à terme, elle va quitter la ville pour vivre plus dans la nature, mais ça va lui prendre encore deux, trois ans avant d’y parvenir. Les prix de l’immobilier sont inprononçables à Vancouver, et mon amie est toujours locataire. Elle et son mari vont s’en aller quand elle aura terminé ses études qu’elle va entamer au printemps et qu’elle pourra créer sa propre entreprise. Mais après tant d’années avec tout le confort matériel à portée de main, ce ne sera peut-être pas du gâteau, et elle aura presque 50 ans aussi ….
Si mon mari avait voulu me sortir de la ville de Denver (3 millions aussi) en 1997, pour me « planter » dans un village comme celui où on habitait en Estrie, je me serais débattue comme une malade. Mais dans ma vie, les choses se sont faites progressivement…. de Denver à Dijon (200,000) à Montréal (3 millions) à Drummondville (40,000) à Waterloo (4,000)….à Whitehorse qui est comme un grand village abandonné de tous au nord de ce pays immense qu’est le Canada. Le village des rebelles de la vie d’aujourd’hui qui vivent leur révolution plus ou moins tranquille, plus ou moins intense, plus ou moins profonde.
Ville ou campagne ? Non, ce n’est même pas la question. Parce que je vivais à la campagne en Estrie, et j’aimais ça à 100% au moins ! Je devrais poser ma question différemment pour comparer la vie à Vancouver (ou équivalent) à Whitehorse (qui à mon sens n’a pas vraiment d’équivalent, même pas Yellowknife) : la liberté de la proximité de tous les services et comemrces et le choix des écoles etc. ou la liberté de vivre selon des principes plus basiques, plus proches de nos vraies besoins. Et je pourrais revenir de ce pas à redire encore une fois : c’est un choix de vie, et c’est personnel. Et non, je ne voudrais pas vivre dans une cabane sans électricité ni eau courante au fond des bois …. Je m’exprime mal : je ne VEUX PAS vivre dans une cabane sans eau courante ni électricité !
Pour moi, le quotidien ici est une vraie découverte, et je trouve que j’ai beaucoup de chance que de savoir que je pourrai me défouler deux ou trois fois par an dans une « vraie » ville si le cœur m’en dit. Je ne voudrais pas – à date…. – qu’il en soit autrement !
Je vous envoie un peu de ma neige …. paraît qu’on en a reçu 2.37 m de PLUS que l’hiver précédent jusque-là, alors je peux partager un peu, hein ! Surtout qu’ici il ne neige presque JA-MAIS, hahaha !
Bonne semaine à toutes et à tous !
Monika
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